samedi 19 juillet 2008

[Oldies] Nick Lowe – Jesus of Cool (1978)

Après quelques semaines infernales qui m’ont laissé dans l’incapacité totale d’écrire une chronique (en plus) tous les sept jours pour (re)présenter dans ces pages un album oublié (ou non), je réactive la partie ‘Oldies’ de ce blog, qui justement commençait à se faire un peu vieille.

Histoire de repartir du bon pied, mettons en avant un disque qui 1) fête ses trente ans 2) vient d’être superbement réédité et 3) est une sacré découverte de ce premier semestre 2008 : ‘Jesus of Cool’ de Nick Lowe. Un artiste qui ne connaîtra la «gloire» que très tardivement, au début des années 90, grâce au succès d’un film sirupeux à souhait, Bodyguard, dont le morceau (What’s So Funny ‘bout) Peace, Love and Understanding, composé dans les années 60, fut repris par Curtis Stigers et inséré dans la bande-originale (soit dit en passant la plus vendue de l’histoire).

Mais avant d’être l’ami indirect de Whitney Houston et de Kevin Costner, Nick Lowe est avant tout un artiste pop par excellence, un homme qui se cache derrière certains des grands disques de ces 35 dernières années (dont celui-ci).

Né en 1949 à Walton-on-Thames, fils d’un officier de la British Royal Air Force, l’Anglais développe très vite une passion et un intérêt grandissant pour la musique avec son ami de toujours, le guitariste Brinsley Schwarz. Ces deux là monteront bon nombre de groupes, dont le plus «célèbre» reste Kippington Lodge, un band très pop à guitare, qui dégotera un joli contrat avec Parlophone en 1966, donnant naissance à cinq singles depuis longtemps passés aux oubliettes de l’histoire de la musique.

Trois ans plus tard, en 1969, les Kippington Lodge changent de nom et deviennent les Brinsley Schwarz, pondent une musique mêlant Crosby, Stills & Nash et The Grateful Dead et signent un contrat chez United Artists. Ratant le succès d’un rien, et au lieu de s’appesantir sur cet échec, les Brinsley Schwarz relativisent, retournent aux racines et se mettent à jouer, énormément, dans les pubs, avec une envie et besoin, et sans aucune pression aucune. En initiant ce mouvement, les Brinsley Schwarz ne le savent pas encore mais ils viennent de créer une caisse de résonance incroyable à un mouvement qui frétille en Grande Bretagne : le punk.

En 1976, toujours sous contrat avec United Artists, et alors que l’on vient de prononcer la mort des Brinsley Schwarz, Nick Lowe décide de quitter la massive structure pour rejoindre Stiff Records, un tout nouveau label indépendant. Las, UA lui met rapidement des bâtons dans les roues, ne le libère pas de son contrat et l’oblige à sortir de nouveaux singles. Vu que notre homme n’est pas le dernier des plaisantins, il s’amuse alors à sortir des disques improbables, espérant se faire virer sans ménagement. Mais quand il enregistre, sous le nom de Tartan Horde un single débile, niais et infantilisant au possible (il faut écouter les paroles pour le croire !) Bay City Rollers We Love You, le titre devient un tube au … Japon ! Et ce n’est qu’en sortant Let’s Go To The Disco sous le nom The Disco Brothers, que Nick Lowe se fait jeter d’UA et part signer dans la foulée chez Stiff Records et y enregistrer, pour une poignée de pounds, ce que certains considèrent être le premier single punk de l’histoire anglaise : So It Goes couplé avec Heart of the City.

Et c’est paradoxal. Car, bien que très porté vers la pop, Lowe se tourne donc franchement vers ce mouvement naissant. Et en devient un des pères. Il produit ainsi le premier album des Damned, ‘Damned Damned Damned’ (et premier album punk anglais de l’histoire), puis les quatre premiers disques d’Elvis Costello (dont le brillantissime ‘This Year’s Model’). Rien que ça.

Il retourne ensuite vers la pop via ‘The Bowi Ep’, blague potache «en réponse» au ‘Low’ de David Bowie, sorti quelques moins plus tôt. En 1978, alors qu’il vient de signer chez Radar Records, il sort enfin son premier album solo, ‘Jesus of Cool’. Dès la réception du disque, toutes les critiques sont unanimes : c’est un chef d’œuvre. Qui ne trouvera pourtant jamais vraiment son public, aussi bien en Angleterre qu’aux Etats-Unis (où le disque sortira sous le nom de ‘Pure Pop For Now People’, avec un tracklisting et une pochette différent). Et pourtant, il a tout plaire.

Car dans ce ‘Jesus of Cool’, il y en a pour tous les goûts : du punk (Heart of The City, voir plus bas), du glam (Tonight, où plane l’ombre de David Bowie, voir plus bas-bis), beaucoup de pop (I Love The Sound of Breaking Glass, son premier top 10 hit single, voir plus bas-ter, ou Marie Provost, aux sonorités Beach Boys-ienne), du rock à la manière des pionniers (Shake and Pop), un brin de ska/reggae (No Reason), et même presque du disco sur Nutted by Reality. Bref, un album hétéroclite mais à l’homogénéité surprenante. Car tout se tient et tout s’enchaîne sans choquer. Tout coule. Nick Lowe est un mélodiste de talent, un producteur hors-pair et cela se ressent à l’écoute de ce ‘Jesus of Cool’.

Que deviendra t-il après ce disque là ? Il en sortira d’autres bien sûr, mais ils frapperont beaucoup moins les esprits et auront encore moins de succès. Parallèlement, il en profitera pour produire le premier single des Pretenders, Stop Your Sobbing, épouser Carlene Carter (la belle-fille de Johnny Cash), tomber dans l’alcool, s’en sortir, produire à nouveau Costello, et voir les millions s’accumuler sur son compte en banque grâce à Kevin Costner.

Depuis cette période, il vit tranquillement, sortant des disques quand bon lui semble et dans le style qui lui plaît. De toutes façons, tout ce qu’il pourra enregistrer n’arrivera jamais à la cheville de ce bijou de pop, de rock et de glam qu’est ‘Jesus of Cool’. Un album brillant, trop peu connu pour être honnête, qui fête aujourd’hui ses 30 ans, de la part d’un pop-man génial, à la trajectoire musicale fluctuante et à l’importance indéniable.

Première sortie: Mars 1978 [Radar]
Réédition: Février 2008 [Yep Roc] (à noter que la réédition est accompagnée de 10 titres bonus de grande qualité et qui prolongent bien l'écoute de l'album original)


Son :
Myspace
Myspace bis
Site officiel

Et comme, même après des semaines d’absence, je ne perds pas mes bonnes vieilles habitudes, voilà trois titres en écoutes : le très pop I Love The Sound of Breaking Glass, le glam Tonight et le punk Heart of the City (dans sa version live). Histoire d’apprécier toute la palette (immense) du talent de Nick Lowe :


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