vendredi 5 mars 2021

James Yorkston and The Second Hand Orchestra - The Wide, Wide River [Domino Records]

Annoncé sous les meilleurs auspices à la fin de l’année dernière par un Struggle qui immédiatement faisait mouche avec sa mélodie simple et la délicatesse de tout ce qui l’entourait, 'The Wide, Wide River' est bien plus qu’un simple nouvel album de James Yorkston. Car pour fêter ses 20 ans de carrière, l’écossais diablement aimé dans ces pages, dont la carrière n’est jalonnée que de finesse, de chansons belles à pleurer et de folk lumineux, n’a pas fait dans la demi-mesure. Oui, après tant d’années, James Yorkston arrive encore à surprendre. Certes, il y a déjà le trio qu’il forme depuis quelques années avec le contrebassiste anglais de jazz Jon Thorne et l’indien Suhail Yusuf Khan sous le nom Yorkston/Thorne/Khan, déroutant de prime abord mais plus que délectable. Mais il y a surtout ce nouvel album 'The Wide, Wide River'.

Un disque qui semble être arrivé par accident ou par magie. Une sorte de miracle inattendu, tant il aurait pu n’être qu’un album folk de plus, où les mélodies de James Yorkston auraient sans nul doute fait mouche, mais où l’ensemble n’aurait pas renversé la table. Alors qu’au final, il est bien plus que cela.

'The Wide, Wide River' est un disque enregistré en Suède avec The Second Hand Orchestra grande confrérie musicale suédoise menée par Karl-Jonas Winqvist et au sein de laquelle on retrouve Peter Morén de Peter Bjorn and John (le tube Young Folks et son sifflement qui a du être utilisé par toutes les émissions de TV du monde, ce sont eux). Un album qui semble avoir été enregistré au débotté, sans idée préconçue : James Yorkston a écrit les chansons, les a joué devant la troupe de The Second Hand Orchestra avant que la joyeuse bande enregistre, live, et mixe le tout en trois jours seulement. 

Et c’est là la force de 'The Wide, Wide River'. Un disque qui n’est pas cloisonné, pas contraint une seconde. Une ligne directrice est donnée au départ, libre ensuite aux musiciens d’en faire ce qu’ils en veulent et d'improviser. Et que ce soit James Yorkston ou The Second Hand Orchestra, tous apportent leur écot à l’œuvre : en faisant débouler, sans que cela soit écrit, quelques accords de guitare folk, quelques notes de violons, quelques ligne de basse, qui tous, plutôt que de désaxer l’ensemble de la chanson, lui donnent une âme supplémentaire. 

Prenez Struggle dont il était question plus haut. Cette chanson est autant la synthèse de tout ce que l'on aime chez James Yorkston qu’un excellent résumé de 'The Wide, Wide River'. Une mélodie simple mais tellement bien entourée qu'elle en ressort belle comme jamais. Malgré les nombreux instrument qui viennent donner du leur, il n’y aucun sentiment de surenchère. Non, ce qui vient l’animer et l’habiller est si délicat que tout sonne comme une évidence : cette batterie feutrée, ces notes de violons qui s'occupent de maintenir le rythme tout du long sans être une seconde larmoyantes, ces guitares et cette basse qui ne font jamais dans l’esbroufe ; et ces chœurs, tout en apesanteur et élégance, qui ne viennent qu’appuyer la douceur de la voix de l’écossais.

On pourrait dire la même chose de l'énergique Ella Mary Leather (qui ouvre 'The Wide, Wide River'). du touchant et pénétrant, aux airs de vielle chanson du folklore écossais, A Very Old-Fashioned Blues, ou du diablement efficace There Is No Upside qui voit la bande lâcher les chevaux dans une euphorie folk jubilatoire. Mais on pourrait dire cela de tous les morceaux de l’album. Des chansons que James Yorkston et The Second Hand Orchestra ne semblent pas vouloir quitter tant ils préfèrent continuer à en développer les mélodies, à les agrémenter d’accords inattendus pour mieux les relancer.

'The Wide, Wide River' est un disque absolument majestueux. Du genre de ceux qui respirent le talent, évidemment, le plaisir aussi. Et surtout la liberté. Un album qui fait beaucoup penser à la « Rolling Thunder Revue » en 1975 de Bob Dylan, où le troubadour écumait les routes et les salles nord-américaines pour mieux présenter ses chansons et bien d’autres choses au gré de ses envies et de la multitude d’amis et personnages qui voulaient bien se joindre à lui (de Joan Baez à Mick Ronson, Allen Ginsberg,  Roberta Flack, Roger McGuinn ou encore Joni Mitchell). Il régnait sur cette tournée (les live de l’époque sont là pour le prouver) une ambiance folle mais simple, où rien n’était surjoué, où chaque performance se fondait dans les autres et surtout apportait à l’ensemble. 

'The Wide, Wide River' est de la même lignée. Un album incroyablement généreux et vivant, plein de superbes chansons que The Second Hand Orchestra habille avec un doigté rare. Mais finalement, c'est James Yorkston qui décrit le mieux ce disque, en quelques simples mots : « this fast-footed, free-wheeling album ». En (belle) roue libre. Cela lui va très bien. (Sortie : 22 janvier 2021)

 

Plus :
'The Wide, Wide River' de James Yorkston and The Second Hand Orchestra est en écoute sur leur bandcamp
'The Wide, Wide River' de James Yorkston and The Second Hand Orchestra est à l'achat sur leur bandcamp
'The Wide, Wide River' de James Yorkston and The Second Hand Orchestra est en écoute, notamment, sur Spotify et Deezer
La Tim's Twitter Listening Party de 'The Wide, Wide River' de James Yorkston and The Second Hand Orchestra est à revivre ici


Trois titres de 'The Wide, Wide River' de James Yorkston and The Second Hand Orchestra en écoute aujourd'hui. Struggle (en écoute également dans les playlists Spotify, Deezer et Youtube) pour débuter. Puis l'énergique There Is No Upside. Et enfin, A Very Old-Fashioned Blues :

Trois clips tirés de 'The Wide, Wide River' de James Yorkston and The Second Hand Orchestra : Struggle, qui montre bien la façon dont a été enregistré l'album. Puis celui d'Ella Mary Leather. Et enfin, à nouveau A Very Old-Fashioned Blues :

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