Il y eut d'abord l'annonce de son homosexualité à ses parents, en forme de libération après avoir tant enfoui ce qu'elle était vraiment. Et puis il y eut la disparition de son père et de sa mère, à trois semaines d'intervalle l'un de l'autre.
Écrit en enregistré dans la foulée de ces évènements, il y a donc fort à parier que 'Big Time', le nouvel album d'Angel Olsen, soit autant introspectif que puissant.
All The Good Times, la chanson qui ouvrira le disque et en est premier single, donne en tout cas un aperçu de ce que donnera 'Big Time'. Un morceau parle autant d'amour que de perte de l'être aimé, à la belle et ample orchestration. Surtout, un titre qu'Angel Olsen chante admirablement bien, aussi concernée que détachée, tout en rappelant à elle le fantôme de Leonard Cohen qu'on dirait par instant avoir pris possession du corps de l'américaine.
Décidément, j'ai du mal à trouver des albums qui arrivent à me plaire pleinement en cette année 2022. Et pourtant, ce n'est pas faute d'essayer de donner sa chance au produit, mais jusque là, sorti de quelques très beaux disques (A Place to Bury Strangers, Black Country, New Road et quelques rares autres), rien qui arrive à me convaincre sur la longueur.
Alors le temps que les albums qui marqueront mon année finissent par arriver (car ils arriveront, forcément), continuons notre plongée dans les singles de haute volée qui pullulent ici et là. Dernier exemple en date, Oblique Fantasy de Jane Weaver, liverpuldienne de son état et dont le dernier album en date ('Flock' en 2020) avait eu son petit effet sur l'auteur de ses lignes. Un single qui verra le jour officiellement en juin prochain chez Speedy Wunderground, incroyable petit label anglais découvert à l'occasion de leur sortie précédente 'Six Hills 7"' de Lewsberg.
A l'instar de ses camarades néerlandais, Jane Weaver propose ici une seule chanson - Oblique Fantasy donc - de plus de 5mns, dispatchée sur chacune des faces du 45-tours. Un morceau de très haute tenue, très bien produit (Dan Carey, un des patrons de Speedy Wunderground est évidemment à la production), à la structure dynamique et qui ne relâche jamais son rythme, que vient sublimer la belle voix de Jane Weaver. Très gros coup de cœur.
Album : Oblique Fantasy 7" Année : 2022 Label : Speedy Wunderground
Connaissez-vous Radio Galère ? C'est une radio marseillaise découverte en 2004 lors de mes six premiers mois de stage chez PIAS, au service promotion. J'avais pour tâche de contacter toutes les radios associatives pour promouvoir nos artistes, ce avec peu de moyens à ma disposition (quelques disques ici et là à envoyer, mais rarement les plus bankable, réservés aux gros médias).
Dans cette liste, il y avait donc Radio Galère et l'émission Hot Fidélité, animée par Sami. Une émission hebdomadaire d'une heure où notre homme diffusait ses coups de cœurs de la semaine. Peu de blabla, beaucoup de musique et surtout des choix souvent pointus et à chaque fois précieux.
Quasiment vingt ans plus tard, Hot Fidélité est toujours là, bien présente, et Sami en tient toujours les rênes. Et la chanson du jour, c'est à lui que je la dois, diffusée qu'elle fût dans son émission du 16 mars dernier. Le groupe, originaire de Manchester, s'appelle Everything Everything et le single en question Teletype. Une chanson d'electronica très efficace, sur laquelle on se déhanchera, et pas que lascivement. Et une des premières banderilles d'un nouvel album à venir, 'Raw Data Feel', qu'on dit en partie créé à partir de l'intelligence artificielle (notamment en ce qui concerne la pochette et certaines des paroles).
NB : "Hot Fidélité" a lieu tous les mercredis à 22h sur Radio Galère (88.4 FM à Marseille). Et chaque émission est en podcast ici.
Album : Raw Data Feel Année : 2022 Label : Infinity Industries
Alors oui, le meilleur des !!! est sans doute derrière eux. Oui, la hype est passée et la folie de leurs premiers morceaux (s'est on vraiment remis de la déflagration Me and Giuliani Down by the School Yard (A True Story) ?) ont sans doute disparu - « sans doute disparu » tant les new-yorkais ont disparu de mon radar.
Pourtant, ils sont toujours là. Toujours signés chez Warp Records. Toujours avec des pochettes aux trois points d'exclamation. Et prêts à dégainer un nouvel album, 'Let It Blue', leur neuvième. Avec un guise de hors d'oeuvre, Storm Around The World, premier single sur lequel ils ont convié Maria Uzor du duo Sink Ya Teeth. Un morceau très efficace, certes plus Scissor Sisters que !!! tel qu'on les connaissait, mais à la mélodie simple et au gimmick pop qui leur vont très bien au teint.
Album : Let It Be Blue Année : 2022 Label : Warp Records
Comme s'il avait douze vies avant de sortir son premier album solo. Voilà donc Swami John Reis, 50 ans bien tapés, à la carrière longue comme le bras et leader d'une pelletés de groupes post-hardcore et rock comme Drive Like Jehu, Rocket From The Crypt ou Hot Snakes. Et son premier album solo, le bien nommé 'Ride The Wild Night'.
Un disque de trente minutes qui ne s'embarrasse pas de détails, va directement au but, entre garage et power-rock, avec un je ne sais quoi du 'Armed Love' de The (International) Noise Conspiracy en 2004. La même énergie, la même fougue et des tubes à la pelle, dont la chanson titre et d'ouverture, superbe, son piano bienvenu et son petit gimmick sur le deuxième couplet qui vient rehausser le tout. Un album « continue à fond, on freinera quand on pourra toucher le virage du doigt », aussi immédiat autant qu'addictif.
Album : Ride The Wild Night Année : 2022 Label : Swami Records
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En plus des playlists Spotify, Deezer, YouTube et Bandcamp, Ride The Wild Night de Swami John Reis est également en écoute ci-dessous :
Le titre du jour ne fait pas dans la finesse et va plutôt droit au but. PUP, groupe canadien auteur de trois albums jusque là sympathiques où l'on trouvait quelques singles pas piqués des vers, n'a en effet pas d'autres prétention que de prendre son pied.
C'est en tout cas ce qui ressort de Matilda, un de leur dernier singles, préludes à 'The Unraveling of Puptheband', quatrième album à sortir le 1er avril prochain, et orné d'une des pochettes les plus laides vues ces dernières années. Une chanson de cœur brisé, mais rentre dedans, entre power-rock et punk à roulettes, et au refrain en mode chanson de stade qu'on se prendrait bien à hurler à tue-tête avec quelques milliers de spectateurs.
Album : The Unraveling of Puptheband Année : 2022 Label : Rise Records
L'Australie, terre de contrastes. Et surtout, terre d'une scène rock qui n'en finit plus de déborder de groupes à guitares. Après les Rolling Blackouts Coastal Fever, Amyl and The Sniffers, The Chats, Royal Chant et autres chouchous de The Beths ou The Stroppies, faites place à un quatuor féminin nommé Body Type qui, après six ans d'activité, est sur le point de sortir son premier album 'Everything Is Dangerous But Nothing's Surprising'. Un disque qui devrait faire dans la power-indie-pop mâtinée de punk.
C'est en tout cas ce que laisse présager Buoyancy, un des deux premiers singles lancés en éclaireur. En anglais, buoyancy a plusieurs signification : au sens premier, « flottabilité ». Au sens figuré, « allégresse, bonne humeur, entrain ». Et force est de constater que les filles de Body Type ont visé juste tant la chanson est imparable, à l'énergie communicative, à la basse merveilleuse et à la mélodie impeccable. On a élevé au rang de nouvelles stars les Wet Leg sur un simple single (l'épatant Chaise Longue). Je crois qu'on peut commencer à faire de même pour les Body Type : Buoyancy est de cet acabit là.
Album : Everything Is Dangerous But Nothing's Surprising Année : 2022 Label : Poison City Records
Finissons la semaine avec une bien puissante découverte : Bodytrap de Holy Reptile, groupe originaire de Bristol - que certains d'entre vous connaissent peut-être déjà vu qu'ils officiaient encore il y a peu sous le nom de Loves Reptile.
Holy Reptile se définit comme un gloomy psyche rock band. Et force est de constater qu'il y a un certain côté lugubre chez eux (et qui explique aussi sans doute qu'ils soient signés sur le label anglais Black Dog, maison mère des sinistres mais si cool Wych Elm).
La preuve donc avec Bodytrap, premier extrait de leur album à venir ('Yawner', littéralement « chiant »). Une chanson qui démarre presque calmement, avec un chant et une musique
qu'on dirait mis sous cloche, sans pouvoir réellement
s'exprimer. Puis les guitares reprennent le pouvoir et font exploser ce
carcan dans lequel tout ce beau monde était enfermé pour mieux envoyer du fuzz à tout va pour une seconde partie jubilatoire au possible.
Album : Yawner Année : 2022 Label : Black Dog
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En plus des playlists Spotify, Deezer, YouTube et Bandcamp, Bodytrap de Holy Reptile est également en écoute ci-dessous :
Le clip de Bodytrap de Holy Reptile :
Second single de 'Yawner', le premier album de Holy Reptile, voilà Spiralling :
Mettons un peu d'indie-pop dans cette semaine lyonnaise pleine de poussière du Sahara et écoutons donc Bad Love, le nouveau single de Dehd, trio américain originaire de Chicago et qui annonce la suite d'un 'Flower Of Devotion' remarqué en 2020.
Au programme, une chanson de 2'30" tout pile, à la guitare jangle, à la mélodie catchy à souhait et aux paroles qu'on fredonnera à l'envie et à tue-tête plus souvent qu'à son tour : « Yea now run baby run, run from the bad love ».
Plus prosaïquement, on trouve - évidemment - Bad Love de Dehd sur Bandcamp. Meilleure plateforme musicale actuelle (et depuis un moment), elle rémunère justement les artistes ; les a soutenus plus que quiconque avec ses fameux Bandcamp Friday (chaque premier vendredi du mois, le site reverse tous les revenus des ventes réalisées ce jour là aux artistes concernés). Et beaucoup des chansons présentées dans ces pages jour après jour sont présentes sur Bandcamp. D'où la création d'une playlist supplémentaire pour ce blog, spécial Bandcamp donc, et qui vient en complément des playlists Spotify, Deezer et Youtube habituelles. A découvrir ici !
Album : Blue Skies Année : 2022 Label : Fat Possum
Suite à l'excellent 'Stray' de 2020, sorte de roman noir en dix chapitres composés par Nick Cave et Iceage, les new-yorkais de Bambara sont de retour avec un nouvel Ep, 'Love On My Mind'. Un titre bien positif pour un disque qui continue de fouiller dans les noirceurs de l'âme et de raconter les vies de gens qui ont suivi une autre voie que celle que l'on avait tracé pour eux.
Mais c'est ainsi qu'on les aime de toutes façons, à les entendre conter leurs histoires un peu sordides, un rien déviantes, entre deux riffs de guitares ou de langoureuses frappes de batterie. Six titres pour ce 'Love On My Mind', moins Ep que mini-album au final ; et à l'enlevé, réussi et très sexuel Mythic Love (qui ne s'embarrasse pas de circonvolutions : «
Hearing my name when you cum, it’s the Father, the Holy Ghost, and The
Son. It’s a mythic kind of love ») on préfèrera toutefois Birds et surtout l'incroyable Little Wars, blues noir au chant féminin merveilleux (Drew Citron, bassiste de Public Practice) en contre-point de celui de Reid Bateh, où violence et douleur percent. Un yin/yang majestueux.
Album : Love On My Mind Ep Année : 2022 Label : Wharf Cat
Jusque-là, il faut bien dire que rien n'incitait à l'optimisme pour ce nouvel (et neuvième) album des Spiritualized de Jason Pierce. La faute à deux premiers extraits certes sympathiques mais un peu trop en pilotage automatique ; ainsi qu'à la pochette, resucée du plus bel album du groupe 'Ladies and Gentlemen We Are Floating in Space' en 1997.
Heureusement, Spiritualized vient de dévoiler The Mainline Song, un troisième extrait de 'Everything Was Beautiful', l'album en question à venir. Une chanson de près de six minutes (dont trois d'intro), qu'on aurait bien vu naître à une autre époque sous les doigts d'Arcade Fire, et qui est une bouillonnante cavalcade orchestrale aux guitares qui ne s'en laissent pas compter. Le genre de morceau qu'on imagine aisément clôturer les prochains concerts du groupe, en la faisant durer, durer et encore durer pour mieux faire tourner les têtes. Oui, The Mainline Song est de cet acabit là.
Album : Everything Was Beautiful Année : 2022 Label : Fat Possum
Il y a deux ans de cela, La Blogothèque (qu'on ne présente plus) avait lancé une série d'enregistrements et de vidéos en proposant à dix groupes de reprendre une chanson à l'univers opposé du leur. Intitulé "Reprise", et avec pour mot d’ordre « Que reste-t-il de l’esprit punk », ces vidéos avaient été diffusées à l'époque sur France Télévision, partenaire du programme.
Alors que la saison 2 de "Reprise" est actuellement en diffusion (voir ici), les dix premiers morceaux (sans doute pour capter une audience internationale) viennent de débarquer sur Youtube. Avec au programme Arlo Parks qui reprend Patti Smith, Asgeir The Stranglers ou encore We Hate You Please Die qui s’approprie Bad Girls de M.I.A. (l'ensemble des vidéos est à regarder ici).
Mais c’est surtout la reprise de I'm a Man You Don't Meet Every Day qui a attiré mon oreille. Traditionnel - écossais ou irlandais, c'est selon - composé dans les
années 1880s, popularisé par The Pogues en 1985, il est repris ici par En Attendant Ana, groupe dont on ne dira jamais assez le plus grand bien.
Passé à côté en 2020 et mis sur ma route par le toujours sûr Ben Laredo (ses playlists de coups de coeur mensuels valent le détour), la version d'En Attendant Ana a tout de la reprise épatante : elle s'éloigne du traditionnel originel (devenu avec le temps une chanson à boire) pour mieux épouser un rythme plus pop et nerveux. Introduit par la voix de Margaux Bouchaudon, un orgue et une trompette plaintifs, cette version s'emballe en effet aussi sec avec une guitare qui monte et qui descend, et une basse formidable qui donne un relief rock et presque punk à l'ensemble. Le genre de reprise parfaite dont on aurait sans doute fait un tube à une autre époque. Et qui mériterait de l'être, même deux ans après.
Album : - Année : 2020 Label : -
En plus des playlists Spotify, Deezer et YouTube, I'm a Man You Don't Meet Every Day des Pogues repris par En Attendant Ana est en écoute ci-dessous, interview du groupe incluse :
Qui aurait bien pu parier qu'une des égéries de la variété française des années 60 se retrouverait dans le titre d'une chanson indie-rock de 2022, portée par la tête de proue de feu The Pains of Being Pure at Heart, un des groupes passionnants des années 2000 ? Mais surtout, qui aurait pu parier que l'égérie en question serait Sylvie Vartan - et non, au hasard, une Françoise Hardy, qui fit battre bien des cœurs anglo-saxons à l'époque ? Et pourtant, Kip Berman et ses The Natvral viennent de sortir un nouveau single (disponible dans quelques semaines au format 45-tours) intitulé 'A Portrait of Sylvie Vartan'.
La face-A - et chanson titre - semble toute droit sortie des mains du Bob Dylan de 'Highway 61 Revisited' : cet orgue Hammond, cette construction, ce chant, cette façon d'amener le refrain, tout semble d'époque. Mieux, plus les écoutes passent, plus il y a une ambition à la Like a Rolling Stone qui irradie tout au long de ce morceau. La durée de A Portrait of Sylvie Vartan est plus courte certes (3'20" seulement au compteur), pour autant le parallèle semble à chaque fois un peu plus évident. Et si The Natvral venait de sortir son grand œuvre ?
Album : A Portrait of Sylvie Vartan 7" Année : 2022 Label : Prefect Records
Véritable coup de cœur en 2019 ('Whoosh'), confirmé l'année suivante avec 'Look Alive!' (disque que j'ai pris à tort pour leur second album lors du bilan de fin d'année 2019, alors qu'il est considéré comme un Ep), les délicieusement lo-fi-pop et do it yourselft de The Stroppies reviennent de leur Melbourne natal et sont prêts à donner naissance à un nouvel - et deuxième donc - album. Il s'appellera 'Levity' et sortira le 6 mai prochain chez les toujours impeccables Tough Love.
Et à l'écoute de The Perfect Crime, chanson d'ouverture et premier single lancé en éclaireur, il semblerait qu'on ait affaire à une nouvelle mouture de The Stroppies. Pas tant niveau personnel (même si le quatuor accueille en son sein une certaine Zoe Monk) mais plus dans son orientation musicale. Car ce premier morceau est carré, bien produit et évacue le lo-fi qui faisait - notamment - le charme du groupe. La jangle-pop s'éloigne, une veine plus rock qu'on pourrait qualifier de 90s (c'est de saison) la remplace ; mais le résultat reste le même : brillant. Certes, on ne s'emballera pas de trop à la lecture de quelques mots couchés par Rough Trade pour présenter ce 'Levity' à venir (le magasin cite aussi bien Guided by Voices, Pavement, The Clean ou XTC), mais on restera attentif : The Perfect Crime est une chanson très prometteuse.
