Il y a des jours comme ça où rien ne va. Où l’on a beau faire, tout se transforme en catastrophe. Où la moindre de nos initiatives se termine invariablement par un échec. Oui, il y a des jours comme ça. Des semaines même. Et puis, il y a des vies comme ça.
Prenons Jackson C. Frank. Né en 1943 à Buffalo. Mort à 56 ans, sans le sou. A peine sauvé de l’oubli de l’histoire de la musique par un jeune fan de folk. Un artiste pétri de talent qui aura connu les affres du mauvais œil : il échappe d’un rien à un incendie dans son école à 11 ans, où 18 de ses camarades trouvent la mort ; son âme-sœur, sa muse Sandy Denny l’abandonne (avant de mourir quelques années plus tard, à 30 ans); sa deuxième femme le quitte lorsque son fils décède alors qu’il n’est qu’un bébé ; il enchaîne les dépressions, connaît les « joies » de l’hôpital psychiatrique, perd l’usage de ses deux jambes et finit infirme et borgne. Bref, le bonheur et la chance réunis en un seul être.
Tout cela ne l’a toutefois pas empêché, le temps de 3h à Londres et avec l’aide de Paul Simon, de signer un des plus beaux disques des années 60 : 'Jackson C. Frank'. Peut-être même le plus grand disque de folk des sixties.
Un disque d’une tristesse insondable, à l’image de sa vie et de ce qu’elle allait devenir. Dix titres ébouriffants, portés par une voix, mélange de douceur et de profondeur, assez exceptionnelle. Un album traversé d’histoires d’amour déchirantes et de cœur brisés, de mélodie splendides et de touché de cordes délicat. Tout y est. De l’acabit d’un Dylan. Et même plus tiens, Bob Dylan, pourtant héros de l’auteur de ces lignes, n’ayant jamais sorti un album folk de cette classe là.
Dans les années 90, Jim Habbot, un jeune fan de folk entame une véritable enquête policière pour remettre la main sur Jackson C. Frank, le retrouve, fait sortir de l’oubli le disque qui porte son nom ainsi que cinq titres de 1975, du même niveau que ceux enregistrés dix ans plus tôt (que l’on peut retrouver sur les diverses rééditions qui verront le jour dès 1995).
En 2003, Vincent Gallo ajoute même Mik and Honey, son grand œuvre, au générique de son film The Brown Bunny, assurant par la même à Jackson C. Frank un début de notoriété posthume. Notoriété qui reste toutefois à des années lumière de ce qu’elle devrait être vu la qualité incroyable de cet album.
Car cet album est un disque impensable. Qui donne les larmes aux yeux. Qui rend bouche bée. Et ahuri. Un album indispensable aussi pour qui veut comprendre l’histoire de la musique contemporaine. Car Jackson C. Frank, avec ce simple et unique disque qui ne sortira jamais de la communauté folk de l’époque, va inspirer bon nombre d’artiste en devenir. Dont un certain Nick Drake, autre génie malheureux et bouleversé, qui puisera tonnes d’inspirations dans ce répertoire de quinze titres. Un Nick Drake qui finira lui aussi plutôt mal. A croire que l’on paye un certain tribut à s’inspirer de Jackson C. Frank, poissard de talent mais artiste de génie. M’étonnerait pas que l’ami Syd Barret n’ait pas usé jusqu’à la corde cet album là tiens.
Nb: cette chronique n'est finalement pas nécessaire. Une seule lecture concernant Jackson C. Frank vaut le détour. Celle de Raoul-Lachenay, auteur d'un très beau texte sur le bonhomme et sur sa vie, et qui m'aura fait découvrir cet artiste. Cet article se trouve ici, sur Ordet Blog (le blog qu'il faudrait garder s'il ne devait en rester qu'un seul)
Première sortie : 1965 (CBS)
Dernière réédition : 2003 (Sanctuary)
Son :
Myspace (un myspace de fan, évidemment, avec 5 titres en écoute).
Vu qu'on est dimanche et vu la qualité de cet album, trois titres en écoute: Milk and Honey, Don't Look Back et Dialogue. Enjoy!
Tout cela ne l’a toutefois pas empêché, le temps de 3h à Londres et avec l’aide de Paul Simon, de signer un des plus beaux disques des années 60 : 'Jackson C. Frank'. Peut-être même le plus grand disque de folk des sixties.
Un disque d’une tristesse insondable, à l’image de sa vie et de ce qu’elle allait devenir. Dix titres ébouriffants, portés par une voix, mélange de douceur et de profondeur, assez exceptionnelle. Un album traversé d’histoires d’amour déchirantes et de cœur brisés, de mélodie splendides et de touché de cordes délicat. Tout y est. De l’acabit d’un Dylan. Et même plus tiens, Bob Dylan, pourtant héros de l’auteur de ces lignes, n’ayant jamais sorti un album folk de cette classe là.
Dans les années 90, Jim Habbot, un jeune fan de folk entame une véritable enquête policière pour remettre la main sur Jackson C. Frank, le retrouve, fait sortir de l’oubli le disque qui porte son nom ainsi que cinq titres de 1975, du même niveau que ceux enregistrés dix ans plus tôt (que l’on peut retrouver sur les diverses rééditions qui verront le jour dès 1995).
En 2003, Vincent Gallo ajoute même Mik and Honey, son grand œuvre, au générique de son film The Brown Bunny, assurant par la même à Jackson C. Frank un début de notoriété posthume. Notoriété qui reste toutefois à des années lumière de ce qu’elle devrait être vu la qualité incroyable de cet album.
Car cet album est un disque impensable. Qui donne les larmes aux yeux. Qui rend bouche bée. Et ahuri. Un album indispensable aussi pour qui veut comprendre l’histoire de la musique contemporaine. Car Jackson C. Frank, avec ce simple et unique disque qui ne sortira jamais de la communauté folk de l’époque, va inspirer bon nombre d’artiste en devenir. Dont un certain Nick Drake, autre génie malheureux et bouleversé, qui puisera tonnes d’inspirations dans ce répertoire de quinze titres. Un Nick Drake qui finira lui aussi plutôt mal. A croire que l’on paye un certain tribut à s’inspirer de Jackson C. Frank, poissard de talent mais artiste de génie. M’étonnerait pas que l’ami Syd Barret n’ait pas usé jusqu’à la corde cet album là tiens.
Nb: cette chronique n'est finalement pas nécessaire. Une seule lecture concernant Jackson C. Frank vaut le détour. Celle de Raoul-Lachenay, auteur d'un très beau texte sur le bonhomme et sur sa vie, et qui m'aura fait découvrir cet artiste. Cet article se trouve ici, sur Ordet Blog (le blog qu'il faudrait garder s'il ne devait en rester qu'un seul)
Première sortie : 1965 (CBS)
Dernière réédition : 2003 (Sanctuary)
Son :
Myspace (un myspace de fan, évidemment, avec 5 titres en écoute).
Vu qu'on est dimanche et vu la qualité de cet album, trois titres en écoute: Milk and Honey, Don't Look Back et Dialogue. Enjoy!