mercredi 30 juillet 2025

Destroyer - Dan's Boogie [Merge Records]

'Dan's Boogie' fait partie de ces disques qui ne séduisent pas au premier abord. Il faut dire que si sa deuxième partie est plus sage et piano-centré, tout le début est trop dans l'excès, voire dans le mauvais goût (sirupeux par ci, grotesque par là, avec la voix de Dan Bejar qui sonne presque comme un agent étranger), porté par une production là rien que pour amplifier le moindre de ces défauts.

Et puis, bizarrement, sans que l'on s'en rende réellement compte, on relance l'écoute. Déjà parce qu'il s'agit de Destroyer, que si Dan Bejar m'a un peu perdu depuis quelques albums, cela reste un artiste assez à part sur la scène actuelle. Ensuite parce que très vite, on se rend compte que la première impression était fausse tant on est séduit par cet ensemble volontairement un peu de guingois. Plus on avance, plus on se dit que le disque s'ouvre par une chanson (The Same Thing as Nothing at All) non pas too much mais au contraire absolument sublime et qui met vraiment 'Dan's Boogie' sur orbite. Que la suivante (Hydroplaning Off the Edge of the World) est d'une efficacité sans borne et que ses effets de style (ce riff de guitare qui apparait à contre courant du reste pour aussitôt disparaitre) n'est pas de mauvais goût, bien au contraire. Que Bologna et son ambiance trip-hop est un morceau merveilleux. Que Sun Meets Snow et ses cuivres qui débarquent d'un coup d'un seul, comme s'ils s'incrustaient à une soirée avant d'être raccompagnés sans délai à la porte par un maelstrom aussi bruitiste que mélodieux, fait mouche.

On pourrait détailler plus en profondeur chacune des neuf chansons qui composent 'Dan's Boogie'. Dire à quel point la voix de Dan Bejar, pas entendue depuis longtemps, est en fait au diapason de ses mélodies, qu'il n'en est rien distancié mais qu'il y vogue avec un flegme charmeur. Mais on proposera plutôt d'écouter cet album, le meilleur de Destroyer depuis 'Kaputt' en 2011. Et à tous ceux qui, comme moi sont passés à côté au départ, de l'écouter vraiment et de lui redonner quelques chances, car comme souvent avec Dan Bejar, tout se mérite. Puis tout s'éclaire d'un coup. Sa grandiloquence vous veut du bien. (Sortie : 28 mars 2025)

Plus :
'Dan's Boogie' de Destroyer est à l'écoute sur bandcamp
'Dan's Boogie' de Destroyer est à l'achat sur bandcamp
'Dan's Boogie' de Destroyer est à l'écoute et à l'achat un peu de partout sur ce lien

Trois chansons de 'Dan's Boogie' de Destroyer en écoute aujourd'hui. The Same Thing as Nothing at All, la chanson d'ouverture, parfaite mise en bouche (en écoute également dans les playlists Spotify, Deezer, Tidal, YouTube et dans la colonne de gauche du blog). Puis la superbe Bologna (en duo avec Fiver). Et enfin le déroutant mais si efficace Hydroplaning Off the Edge of the World :

Deux clips extraits de 'Dan's Boogie' de Destroyer : Hydroplaning Off the Edge of the World et Bologna

mardi 29 juillet 2025

[Track of The Day] C Duncan - Lucky Today

Si 'It's Only A Love Song', le nouvel album de l’écossais C Duncan, n'a pas toute mes faveurs à cause de son trop plein d'orchestrations, de son manque de finesse et du sentiment qu'il tourne trop vite en rond, on y trouve tout de même Lucky Today. Elle y occupe la deuxième position, et, n'y allons pas par quatre chemins, dans le genre beauté rare, elle se pose là.

Dans Lucky Today, rien n'est superfétatoire, tout y est à sa place, tout y est juste, de sa basse discrète mais câline, à la voix de C Duncan d'une grande vérité, de ses arrangements fournis mais jamais larmoyants qui débarquent toujours au bon moment, de son emphase contrôlée qui vient et qui va, à ces quelques « wouhou » qu'aurait aimé Brian Wilson. Une véritable beauté clinique qu'on dirait tirée d'une bande originale de film et qu'auraient parrainé les Beach Boys. Superbe de bout en bout.

Album : It's Only A Love Song
Année : 2025
Label : Bella Union

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En écoute dans les playlists Spotify, Deezer, Tidal, YouTube et dans la colonne de gauche du blog

En plus des playlists Spotify, Deezer, Tidal et YouTube, Lucky Today de C Duncan est également en écoute ci-dessous :
 

lundi 28 juillet 2025

[Track of The Day] Triptides - Your Darkness

Sans rien enlever à leur talent pour écrire de bonnes chansons, je n'ai jamais été emballé par Triptides, groupe américain né dans l'Indiana sous la férule de Glenn Brigman et qui a depuis émigré vers le soleil de la Californie - qui convient sans doute bien mieux à leur musique. Et quand bien même, c'est un label bien de chez nous, et pas n'importe lequel (Croque Macadam, celui d'Alexandre Gimenez-Fauvet) qui a publié leur premier 45-tours, 'Going Under'.

Leur dixième et dernier album en date ne fait pas exception. Il s'appelle 'Shapeshifter' et continue à suivre le sillon de leur discographie, à coups de pop psyché bien sentie. C'est bien fait, c'est plaisant, c'est joliment produit mais pour tout dire, ça ne m'émeut pas vraiment. Pour autant, difficile de résister à Your Darkness, troisième chanson de 'Shapeshifter', sa vibe 70s, ses synthés prog, sa psyché qui infuse de partout, sa progression et, surtout, la qualité de sa mélodie.

Album : Shapeshifter
Année : 2025
Label : Label 51 Recordings

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jeudi 24 juillet 2025

[Track of The Day] Mike Reid & Joe Henry - Life and Time

Perdu de vue depuis 2007 et un 'Civilians' beau comme tout où un sosie de PJ Harvey assis dans une calèche habillait la pochette, Joe Henry, certes sans connaître l'éclat et l'accueil de son 'Tiny Voices' de 2003, n'a pour autant jamais arrêté de jouer et de composer pour mieux continuer une carrière désormais longue de quarante ans.

Et c'est avec surprise qu'il revient dans mes oreilles à l'occasion de la sortie de Life and Time, premier single de l'album du même nom à venir en septembre qu'il a écrit avec Mike Reid, compositeur américain de treize ans son aîné, à la trajectoire stupéfiante et singulière. Car avant de chanter (un peu) et d'écrire pour les autres (beaucoup et notamment pour Ronnie Milsap), Mike Reid a été une star du football américain universitaire, a été sélectionné en septième position de la draft 1970 par les Cincinnati Bengals, d'y jouer quatre saisons, d'y être très bon (un des meilleurs pass rushers de son époque), d'y établir des records (meilleur sacker d'alors de la toute nouvelle franchise des Bengals) avant de mettre un terme à sa carrière, autant à cause de blessures que de son envie de se mettre à composer.

Et Life and Time donc me direz-vous ? Hé bien c'est une mise en bouche superbe de ce nouveau duo pas de première jeunesse (143 ans à eux deux) mais au talent sûr et certain. Mike Reid (au piano) et Joe Henry (à la guitare) inversent leurs rôles habituels, le premier prenant le chant principal, le second venant comme murmurer les paroles en soutien de son acolyte, dans une chanson qui a des atours de noir et blanc, mais sans pour autant être crépusculaire, la simplicité (seuls quelques cordes discrètes viennent s'immiscer en toute fin) et la mélancolie rendant l'ensemble assurément splendide.

Album : Life and Time
Année : 2025
Label : Work Song / Thirty Tigers 

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Le clip de Life and Time, premier extrait de l'album du même nom de Mike Reid et Joe Henry :

mercredi 23 juillet 2025

[Track of The Day] Elly Kace - Even with the light on

Petite douceur au programme du jour avec Even with the light on de l'américaine Elly Kace. Une chanson qu'elle présente d'une belle façon : « Prescription : Couper le cordon. Effets secondaires : chagrin, libération ». Car il est question ici de fantômes qui nous collent à l'âme et qui restent attachés à nous alors que l'on aimerait bien s'en détacher. Comme Elly Kace le dit elle même « No matter the spells I cast, the lights I keep lit, there are some souls that are tethered to my existence that hold me in fear patterns. The gentle and loving release of them is the challenge of a lifetime. »

Au-delà du texte et du sens de Even with the light on, c'est surtout musicalement qu'Elly Kace sublime son auditoire. Une chanson délicate autant qu'insaisissable tant elle semble voler ici et là, dans une ambiance cotonneuse à la langueur belle comme tout, qu'un petit gimmick délicieux vient soutenir tout du long et qui une fois dans vos oreilles ne cesse d'y flotter sans jamais vouloir en sortir.

Album : -
Année : 2025
Label :

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lundi 21 juillet 2025

[Track of The Day] Kae Tempest - I Stand On The Line

'Self Titled' est le sixième album de l'anglais Kae Tempest (le second depuis son changement d'identité) et pour ainsi dire, je ne saurais trop vous dire de quoi il retourne. La faute à I Stand On The Line (en écoute aujourd'hui), le morceau d'ouverture si incroyable qu'il est difficile de ne pas écouter, réécouter et réécouter jusqu'à plus soif.

Une chanson portée par une production ample et généreuse où Kae Tempest rappe un texte fort sur sa (et la) transidentité, sa difficulté à la comprendre, à l'assumer (« It was a belt 'round my neck / It was too big to look at square on it kept growing / I'd known it forever, but I tried to stop knowing »), à affronter ses peurs (« Terrified if I told the truth and stopped hiding / (...) I would sacrifice everything I'd made for myself / My family, my friends, the people who felt my music, would all leave »), le regard des autres et sa violence intrinsèque (« I know it hurts you when they look at you strange / Misgender you intentionally, use your deadname / (...) / Assault you in the street until you're hardly moving ») et tout ce qu'il a du subir pour être celui qu'il est aujourd'hui (« Thirty-seven, going through a second puberty »).

Sorte de rencontre entre Little Simz et Sage Francis, I Stand On The Line est une chanson engagée, dure, qui n'élude rien des difficultés à être trans en 2025 (« Why are trans bodies always on the agenda? »), qui ne fait pas de faux-semblant, nous renvoie à nos préjugés idiots, et dans le même temps transpire de courage, de force, de résilience, de bonheur à être devenu celui qu'il voulait être (« When I pause and reflect on the years spent exhausted and wrecked / I just want to go back, put it all on the deck / And say, "Child, just keep going, keep drawing your breath" ») et donne des raison d'espérer à tous ceux qui, comme Kae Tempest, ont connu, connaissent ou connaitront ces bouleversements intimes. Comme il le dit lui même en deux vers magnifiques sur la fin du premier couplet : « If you turn your back on the light for too long / The light doesn't die, it just stops trying to find you ».

Album : Self Titled
Année : 2025
Label : Island Records

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jeudi 17 juillet 2025

[Track of The Day] The Telephone Numbers - Be Right Down

Quatre ans après un premier album joli comme tout et quelques singles ici et là (la beauté Weird Sister au hasard), les californiens de The Telephone Numbers vont enfin donner une suite à leurs aventures jangle-pop. Et quoi de mieux pour se faire que de signer de Slumberland Records ?

Le label d'Oakland sera donc la nouvelle maison du quatuor, qui a pour ce nouvel album 'Scarecrow II' appelé quelques membres de figures actuelles de l'indie-pop de San Francisco à venir les épauler (The Umbrellas, Neutrals, Chime School ou Tony Molina mais sans Glenn 'The Reds, Pinks and Purples' Donaldson, ancien membre du groupe). Et à en croire le premier single extraitcela promet beaucoup ! Car Be Right Down (en écoute aujourd'hui) est de la race de ces singles impeccables de bout en bout, catchy au possible, indie/jangle-pop comme jamais et qu'un violon sur le refrain envoie au royaume des grandes chansons.

Album : Scarecrow II
Année : 2025
Label : Slumberland Records

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mercredi 16 juillet 2025

[Track of The Day] Mên An Tol - Not Ideal

Le saviez-vous ? Mên An Tol est le nom d'un site mégalithique des Cornouailles, célèbre pour sa pierre circulaire trouée accompagnée de deux autres pierres dressées, et auxquelles on attribue des pouvoirs miraculeux et notamment de guérison.
Sans aucun lien avec d'éphémères homonymes, à l'accent circonflexe près, du début des années 2010, Mên An Tol est également le nom du groupe du jour. Un quintet londonien, dont le chanteur Bill Jefferson est originaire des... Cornouailles (ceci expliquant cela), aux têtes et à la musique on ne peut plus anglaises et qui s'apprête à publier son deuxième Ep de l'année.

Un disque ('This Land'), promis pour fin septembre prochain, produit par le Fontaines D.C. Carlos O’Connell et qui s'annonce par Not Ideal (en écoute aujourd'hui), chanson qui ne fait pas dans le neuf, mais qui a le bon goût d'être bien mené, mélodiquement impeccable et mélancolique à souhait. De  la belle ouvrage indie-pop.

Album : This Land Ep
Année : 2025
Label : Mên An Tol Records

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Le clip de Not Ideal, premier extrait de 'This Land', le nouvel Ep de Mên An Tol :

lundi 14 juillet 2025

[Track of The Day] Caity Baser - Running From Myself

Après quelques semaines de vacances les pieds dans l'eau, le vent dans les cheveux et le soleil sur le visage, retour aux affaires avec Running From Myself, une des trois nouvelles chansons de l'anglaise Caity Baser, sans doute prélude à un nouvel album à venir.

Un morceau enregistré à grand renforts de musiciens (quatorze aux cordes, six aux cuivres, rien que ça), de clappings et de chœurs sur le refrain, qui fait tout bien en 2'37" tout pile, entre une ligne de basse on ne peut plus classique (combien de chansons a-t-elle déjà accompagné ?), une énergie communicative et un rythme échevelé. Certes, Running From Myself de Catie Baser ne passera peut-être pas l'été, mais si c'est le cas (ce qui reste à prouver), elle a déjà de quoi habiller bon nombre de soirées d'ici la fin du mois d'août.

Album : -
Année : 2025
Label : Capitol Records

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Le clip de Running From Myself de Caity Baser :