Voilà une signature que l'on ne qualifiera pas d'usurpée, loin de là. Auteur d'un premier album ('Football Money') aussi pétaradant que court l'an passé et arrivé dans nos contrées européennes au début de cette année, le quartet canadien de Kiwi Jr. (au sein duquel officie Brian Murphy d'Alvvays) mérite largement d'intégrer l'écurie Sub Pop.
Leur second album devrait sortir au début de l'année 2021, mais histoire de faire patienter son monde et, ne nous le cachons pas, de commencer à se faire connaître auprès d'une plus large audience, Kiwi Jr. propose un nouveau single, Undecided Voters, chanson d'indie-pop pleine de morgue et de n'importe quoi, se moquant de l'élection américaine à venir, et où le côté branleur des canadiens n'a rien à envier à leurs élans passés. Vite, la suite.
Mardi soir dernier, l'été 2020 signait ses adieux définitifs. Mercredi matin, l'automne était déjà là. Semble t-il pressé de prendre la place. C'est donc dans une ambiance morose, pluvieuse, fraîche et presque froide que septembre se termine. Autant nous mettre au diapason.
Voilà donc une chanson de Buck Meek, guitariste des Big Thief dont le Not l'an passé avait reçu des faveurs plus que méritées. Elle s'appelle Roll Back Your Clocks et a tout ce qu'il faut d'automnale, bien que sortie courant juillet : une belle mélodie, un chant délicat, une ambiance générale mélancolique et torturée pour une belle balade acoustique et pas si dépouillée que cela. En un mot comme en cent, parfaite pour ouvrir une semaine qu'on souhaite la plus courte possible.
Pour mieux évacuer cette année qui semble sans fin, tentons d'accélérer les choses en évoquant un album de 2021, le second en quelques jours après 'Providence' de Chevalrex. Voilà donc Pearl Charles, américaine venue de Los Angeles et qui sortira le 15 janvier prochain son nouvel album, le troisième chez les new-yorkais de Kanine Records.
Premier single extrait, What I Need donne en tout cas envie d'en savoir plus. Un chanson qui sent bon les années 70, de sa slide guitare délicieuse à sa production tout en rondeur, en passant par la voix et la mélodie ; avec en bonus, une pochette qui est dans le ton. Charmant.
Album : Magic Mirror Année : 2021 Label : Kanine Records
Casting de choix pour ce nouvel album de Tim Heidecker, jugez plutôt : The Lemon Twigs, Jonathan Rado de Foxygen, Trey Pollard l'homme derrière certains des arrangements de ce chef d’œuvre qu'est 'Hang' de Foxygen et Natalie Mering, aka Weyes Blood, dont le 'Titanic Rising' l'an passé avait conquis beaucoup de cœurs (pas vraiment le mien au final).
Weyes Blood est d'ailleurs énormément au chant sur ce disque si l'on écoute les premiers extraits dévoilés, mais jusqu'à hier, c'était vraiment en fond, où elle s'occupait des chœurs ou ne pointait le bout de sa belle voix trainante qu'épisodiquement.
Sur Oh How We Drift Away, le nouveau morceau de 'Fear of Death' dévoilé mardi, Tim Heidecker laisse totalement la place à Weyes Blood. C'est elle qui prend les rênes de cette chanson de plus de 5mns, longue mélopée et chaudement habillée de cordes, de piano et de guitare langoureuse. Beauté instantanée au charme suranné.
Album : Fear of Death Année : 2020 Label : Spacebomb Records
En plus des playlists Spotify, Deezer, YouTube et Qobuz, Oh How We Drift Away de Tim Heidecker avec Weyes Blood à la voix est également en écoute ci-dessous :
Ce papier sera court. Non pas que je n'ai pas envie de parler de Tugboat Captain ou que ce Day to Day n'est pas une bonne chanson. Bien au contraire, elle est franchement formidable. Le genre de morceaux qui vous donnent envie d'écouter encore plus et plus de musique, qui plus est après une période estivale où les coups de cœur n'ont pas été nombreux.
C'est juste que l'album des Tugboat Captain sort le 16 octobre prochain. Et vu les deux premiers extraits dévoilés jusque-là (Day to Day donc mais aussi No Plans (For This Year)) me font espérer un grand et bel album. Et que j'y reviendrai sans doute plus en longueur fin octobre.
Sachez tout de même donc que Tugboat Captain est un quatuor londonien, que 'Rut' sera leur premier album ('The Tugboat Captain' (2016) et 'Everybody Seems To Think That I'm A Raincloud' (2017) sont sans doute des compilations de divers singles) ; et que donc, Day to Day, qui terminera le disque, est une chanson des plus belles, une sorte de symbiose entre Death Cab For Cutie (notamment pour la voix qui a beaucoup d'accointance avec celle de Ben Gibbard) et The Polyphonic Spree. Un grand morceau de pop ambitieux et plein d'allant, aux accents baroques sur la fin.
Album : Rut Année : 2020 Label : Double-A Side Records
Époustouflant sur 'Futurisme' en 2016, Chevalrex m'avait laissé sur ma faim avec 'Anti Slogan' en 2018, après pourtant un premier single épatant (L'Adversaire). Trois ans plus tard et, semble t-il, la pop en bandoulière et des mélodies plein la tête, Chevalrex revient avec un quatrième album, 'Providence', et sortira en... janvier 2021.
Histoire de faire patienter son monde et d'ancrer sa bouille, son nom et ses mélodies dans l'oeil du plus grand nombre, Chevalrex dévoile petit à petit des chansons de ce nouveau disque. Si le premier extrait, Providence, était une courte et jolie bluette, le nouveau passe la vitesse supérieure. Car Tant De Fois est une chanson superbe, à la tension inexorable, où la voix ne prend jamais le pas sur la musique (et inversement) et où le rock dispute le bout de gras à une pop aux arrangements soignés. Classieux et sombre comme il faut de bout en bout.
Évidemment, Sufjan Stevens a tué le game des chansons titrées "4 Juillet" avec son Fourth of July en 2015 sur'Carrie & Lowell'. Mais sans atteindre ces sommets, The Districts, cinq ans plus tard et avec un titre du même nom (le chiffre en plus, les lettres en moins), a tout de même son mot à dire.
Parue sur le quatrième album du groupe de Pennsylvanie, 'You Know I'm Not Going Anywhere', 4th of July est une petite beauté qui clôt un album pas forcément mémorable, mélange de U2 et Coldplay (et c'est tout sauf une comparaison péjorative ici) qui n'arrive jamais à être emballant sur la longueur. Une chanson plutôt parfaite, avec ses sifflements attachants, sa mélodie à la guitare acoustique et sa simplicité qui confine à la beauté, assez folle. Grand morceau mélancolique s'il en est. Leur Til Kingdom Come à eux.
De tous les groupes français qui ont marqué leur époque, Indochine est sans doute celui dans lequel je n'ai jamais réussi à rentrer. Peut-être parce qu'on m'a toujours dit depuis que je suis ado qu'ils étaient ringards, avec Les Inconnus qui en rajoutent une couche avec leur sketch d'Isabelle A Les Yeux Bleus. Peut-être à cause de Nicolas Sirkis dont j'ai toujours trouvé l'attitude trop travaillée et peu sincère. Peut-être à cause de Trois Nuits Par Semaine, 3è Sexe ou l'inévitable L'Aventurier. Allez savoir.
Mais il y a sans doute beaucoup de bonnes choses à prendre chez Indochine. Et je me le dis d'autant plus à l'écoute de ce premier Ep des français de Police Control, 'Noyé Ep'. Trois morceaux que mon oreille a assimilé rapidement à la bande à Sirkis (la pochette ayant joué un rôle également), sans que ce soit pour autant très juste, tant il me semble que les Police Control ont beaucoup plus de guitares et de riffs à faire valoir (toujours cette défiance incongrue).
Il n'en reste pas moins que 'Noyé Ep', malgré ses quelques longueurs (Cet Été) et une homogénéité qui ne coule pas de source (Chute Stationnaire et ses atours New Order), est assez réjouissant, notamment par sa chanson titre et d'ouverture : une production parfaite, des riffs de guitare qui soutiennent toute la mélodie, quelques notes de synthés pour relever le tout et des paroles qui s'impriment dans notre mémoire assez rapidement (« enlacés par ces eaux glacés qui m'ont gelé le cœur je crois que tout m'est égal »). Tube en devenir.
Album : Noyé Ep Année : 2020 Label : Requiem Pour Un Twister
Repéré par l'oreille toujours avisée de Benoît, l'homme derrière Benzine (qui fêtera ses 20 ans d'existence dans 18 mois soit dit en passant) et Hop-Blog, voilà Double Françoise, un duo/couple français composé d’Élisabeth et Maxence Jutel.
Nommé après deux Françoise célèbres (Sagan et Dorléac), Double Françoise fait dans la pop mélodieuse et délicieusement rétro. Et si je moins convaincu par leurs élans bossa, le duo est tout de même épatant sur quelques chansons très bien mises en musique et portées par une production des plus cotonneuses. Notamment Mon Amour Tu Es Belle, avec Élisabeth qui, à la déclaration d'amour de Maxence, rit comme Jane Birkin à l'époque de Melody Nelson ; et surtout Tu N'es Pas Toi, duo gainsbourg-ien en diable entre la même Élisabeth et Benjamin Schoos, patron de Freaksville Records qui publie cet album, et surtout artiste passionnant. Un Benjamin Schoos qui, après le formidable duo avec Laetitia Sadier, prouve à nouveau que sa voix de crooner pop se marie à merveille aux belles voix féminines (en écoute aujourd'hui).
En plus des playlists Spotify, Deezer, YouTube et Qobuz, Tu N'es Pas Toi de Double Françoise en duo avec Benjamin Schoos est également en écoute ci-dessous :
Autre jolie chanson tirée de 'Les Bijoux' de Double Françoise, voilà Mon Amour Tu Es Belle :
S'il y a une chose qu'on peut porter au crédit de la COVID-19, c'est bien les Tim's Twitter Listening Party de Tim Burgess (chanteur de The Charlatans), lancées au début du confinement et proposant une nouvelle façon d'écouter des disques. Rien de révolutionnaire évidemment ici (Tim sélectionne un album majeur - ou non - de l'histoire de la musique, donne une heure de rendez-vous ; à l'heure dite et à son "go", tout le monde chez soi lance le disque dans sa platine et suit sur Twitter l'histoire entourant la production, l'enregistrement ou l'écriture de chacune des chansons de l'album concerné, distillée par un ou plusieurs membres du groupe en question) mais une formidable idée pour (re)découvrir des disques que l'on connaît, ou non, par cœur.
Arab Strap y a eu droit en juin dernier pour 'Philophobia', un de ses chefs d’œuvre (elle est à revivre ici). Aidan Moffat et Malcolm Middleton y ont été brillants, plein d'humour et d'anecdotes, prouvant par la même qu'ils ont beau avoir perdu des cheveux, gagné en barbe ou pris du poids, ces deux zigues n'avaient pas vraiment changé en 22 ans. Ni en 15 ans d'ailleurs.
Quinze ans, c'est l'écart qui sépare leur dernier morceau et le tout nouveau The Turning of Our Bones, révélé hier après-midi. On savait depuis quelques années qu'une reformation d'Arab Strap, autrement que pour quelques concerts, était sur les rails, Malcolm Middleton l'ayant clairement évoqué dans une interview. Mais le lancement il y a quelques mois de cela d'un Bandcamp compilant raretés, versions live ou de démos jamais sorties, me faisait penser que les deux compères n'en avaient finalement pas l'intention, préférant cultiver leur discographie passée tout en continuant à vaquer à leurs occupations musicales, chacun de leur coté.
Et puis il y a quelques jours, un visuel en mode "slasher movie des années 80" est apparu, annonçant « They're back from the grave and ready to rave. Arab Strap lives ! ». Et donc hier, une nouvelle chanson, face-A d'un quarante-cinq tours à venir fin octobre chez Rock Action Records. Rien de bien nouveau me direz-vous, tant les reformations sont à la mode depuis plus d'une décennie. Mais avait-on vraiment envie de les voir tenter la chose, tant les reformations médiocres et sans intérêts écrasent de par leur nombre celles qui ont un sens ? Ne pouvaient-ils pas tomber du mauvais côté et gâcher une discographie à la qualité qui ne se dément pas après toutes ces années ?
C'était oublier bien trop vite que depuis 15 ans, Malcolm Middleton et Aidan Moffat
n'ont jamais cessé d'être intéressants en solo. Que leur
séparation n'a jamais signifié la fin de leur amitié. Et qu'ils n'ont rien perdu de leur talent, de leur humour et de ce recul sur la chose musicale.
The Turning of Our Bones vient confirmer tout ceci de façon éclatante ! Toute Arab Strap-ienne (deuxième partie de carrière), avec cette ambiance
sombre, cette mélodie implacable, cette guitare de Malcolm, cette voix si écossaise d'Aidan, ces arrangements délicats (ces cordes
qui arrivent, ce piano qui déboule), ce pont parfait et ces paroles noires, brillantes (« Let's sing the sighs from our souls »), pleine d'allusions sexuelles (« All I care about right now is that wee mole inside your thigh »), d'alcool («
So if Bacchus is a friend to Love then take this cup of kindness. Just
one sip, one chug, one kiss could cure us of our blindness ») et de retour à la vie (« We've been down among the dead men, now you're coming up with me »), cette chanson est un petit miracle à elle seule. Un titre comme eux seuls savent en composer.
Arab Strap est donc de retour parmi les vivants. Ou plutôt, back from the dead, vu que c'est la ligne directrice de ce premier morceau. Rarement la mort n'a paru aussi belle.
Il faut bien admettre que Barbara Carlotti et moi sommes souvent passés l'un à côté de l'autre. Enfin, Barbara Carlotti... Disons plutôt ses chansons, ne prenons pas nos rêves pour des réalités.
Mais ces rendez-vous manqués, ces chansons que je n'ai pas assez écoutées, ils sont eux bien réels. Pourtant, pour nombre de ses albums, je suis tombé sous le charme de ses
compositions, de ses mélodies pop, de sa voix belle en diable autant que taquine. Avant, sans vraiment savoir pourquoi, de les
délaisser. Sans doute par un trop plein de musique, ou par un manque certain de temps - raison d'autant plus ridicule que l'on sait bien qu'on a toujours le temps, il suffit juste de le prendre.
Je vais donc me faire la promesse pour ce nouvel album, 'Corse, Île d'Amour', de m'y plonger entièrement. En espérant y retrouver ce que je n'ai fait jusque là qu'effleurer, ou simplement des chansons de la qualité d'Ici (en écoute aujourd'hui), en duo avec Pierre Gambini, chanteur et compositeur corse. De toutes façons, même si le disque n'était pas à la hauteur de ce premier morceau onirique et planant à souhait, il me restera cinq albums de Barbara Carlotti à (re)découvrir. C'est bien parfois d'avoir des piqûres de rappel de ce à côté de quoi on sait être passé.