vendredi 30 décembre 2022

Bilan 2022 : « Albums » (20-01)


Il y en avait vingt. Et voilà les vingt autres. La crème de la crème pour mes oreilles en cette année 2022. Loin de moi l'idée de dire qu'il s'agit là des meilleurs albums de l'année et que cette sentence est irrévocable. Car ce sont uniquement les albums que j'ai le plus écoutés de l'année. Ceux qui m'auront émerveillés, émus, enthousiasmés plus que de raison.

Mais avant d'aller plus loin dans l'exposé des disques en question, continuons notre traditionnel tour pour voir ce qui est ressorti de l'année 2022 chez les voisins - plus ou moins proches :
- Le bilan 2022 de Marc d’Esprits Critiques
- Les 50 meilleurs albums de 2022 selon The Revue
- Des artistes, des réalisateurs, des écrivains donnent leur bilan 2022 : c'est le très cool "Année des VIP" de Pop News
- Le best of 2022 de la rédaction de Stars Are Underground
- Le bilan de la rédaction d'Another Whisky For Mister Bukowski

Ils sont donc vingt à composer cette deuxième partie de mes albums de l'année. Vingt albums entre pop à chanter à plein poumons, mélancolie à tous les étages, folk bien ouvragé, rock et post-punk épatants, pop en équilibre précaire, quand elle ne voyage pas dans un expérimental cristallin, hip-hop sans frontière, chansons ethérées et vaporeuses, légende du néo-folk, garage à la sauce pop et en haut, tout en haut, un disque à la simplicité folle mais tellement puissant.
Et comme à chaque fois, au bas de ce papier se trouvent deux lecteurs Deezer et Spotify dans lesquels vous trouverez une chanson de chacun des albums cités ci-dessous, ainsi qu'un lecteur bandcamp pour le seul morceau absent des plateformes de streaming. Bonne lecture, bonne(s) écoute(s) et à dimanche pour le Top 50 singles (et la bonne année aussi).


 

20. Courting - Guitar Music [Pias Recordings]
Non, Courting n’est pas un énième groupe lambda de post-punk. Comme le laissaient présager leurs premiers singles, ils sont plus que cela. Car 'Guitar Music', son post-punk aux quelques échappées belles vers un rock marqué 90s et sa production maligne, cinglante et métallique, a tout pour leur permettre de s'inviter à la table de la nouvelle génération anglaise.
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19. Cloud Cult - Metamorphosis [Earthology Records]
Six ans après 'The Seeker', Craig Minowa et ses Cloud Cult ont fait leur retour. Et avec ce qu’ils savent faire le mieux : des chansons qui respirent la pop par tous les pores, les mélodies attachantes, les orchestrations qui s’emballent. Et la mélancolie, toujours cette mélancolie qui s’immisce, s’étend et vous étreint.
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18. Micah P. Hinson - I Lie to You [Ponderosa]
Micah P. Hinson a toujours l’air aussi malheureux, mais dieu sait qu’il connaît l’art de la belle composition comme personne. 'I Lie to You' est sans doute un de ses albums les plus aboutis de toute sa discographie, un disque très beau où les chansons amples côtoient des titres plus simplement folk - et pas les moins réussis d’ailleurs.
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17. Marmalade Mountain - Strange Angels [Magic Nothing]
Découvert l’an passé avec un 'Ditties' purement folk, Zack Fischmann sous son alias Marmalade Mountain prend ses aises sur 'Strange Angels' son nouvel album. Un disque bien plus orchestré et produit que le précédent, qu’il n’aborde pas seul et où ses chansons folk sont magnifiées par une joyeuse bande de troubadours autour de lui.
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16. Surf Curse - Magic Hour [Atlantic Records]
En signant chez les pas vraiment indie Atlantic Records, le duo Surf Curse est devenu un quatuor. Et le résultat est imposant. Porté par quelques titres ébouriffants (Lost Honor ou Fear City notamment), une production qui sait mettre en valeur autant leurs mélodies que l’énergie de leurs compositions, 'Magic Hour' s’avère vite être un de ces petits bonheurs du quotidien, avec sa pop riffeuse, énervée et un rien slacker.
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15. Pumice - Phylis [Soft Abuse]
Amateurs de pop en équilibre précaire, le trentième album de Pumice est fait pour vous. Avec sa voix étouffée, ses instruments qui flemmardent sans jamais s'ennuyer, grincent sans jamais agacer, enivrent sans jamais étourdir, Pumice crée ici des structures faites de plusieurs strates et divers niveaux d'écoute pour un ensemble cohérent dans son instabilité.
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14. Porridge Radio - Waterslide, Diving Board, Ladder To The Sky [Secretly Canadian]
'Waterslide, Diving Board, Ladder To The Sky' est le disque qui aurait du faire exploser Porridge Radio. Ce n’est pas encore vraiment le cas (la faute à l’absence d’un titre aussi puissant que Long ?) et pourtant, plus consistant que son prédécesseur (pourtant déjà très réussi), il est un disque d’une grande qualité, plein de passion et de rage, très bien écrit, avec pour tête de proue Dana Margolin, femme aussi incroyable sur disque que sur scène et une future star assurément.
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13. Tomberlin - I don’t know who needs to hear this... [Saddle Creek]
Merveilleusement produit, 'I don’t know who needs to hear this...' est un disque délicat et touchant, aussi aérien que vaporeux, langoureux et gracile, où la voix de Tomberlin coule, comme lovée dans l'air, sur des mélodies qui semblent sur le point de s'évaporer. « Je ne sais pas qui a besoin d'écouter ça... » se demande-t-elle en une de ce disque. Beaucoup de monde Sarah Beth. Le plus de monde possible.
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12. Little Simz - No Thank You [Age 101 Music]
Ce qui frappe d'emblée à l'écoute de 'No Thank You', c'est qu'il semble transpirer de colère. Une colère froide, sourde, que Little Simz contient du mieux qu'elle peut pour éviter qu'elle n'explose, mais qu'elle n'hésite pas à afficher clairement dans des textes pugnaces et qui ne transigent pas. Et puis il y a les productions d'Inflo chiadées, les compositions solides et ce flow inimitable. Dix chanson et cinquante minutes qui oscillent en rap, hip-hop, soul/neo-soul qu'elle agrémente de chœurs gospel à faire frissonner le plus sévère des hommes. Si 'Sometimes I Might Be Introvert' était le côté pile de Little Simz, 'No Thank You' semble être son côté face. A la chaleur des compositions du premier, il y a un sentiment plus froid, plus sombre sur le second. A l'image de la pochette : extravagante et pleine de couleur d'un côté, sérieuse et aux tons noir et blanc de l'autre. Mais dans les deux cas, une grande œuvre d'une artiste qui compte. Qui fait ce qu'elle veut. Comme elle le veut. Quand elle le veut.
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11. Pascal Comelade - Le non-sens du rythme [Because Music]
Sur 'Le non-sens du rythme', Pascal Comelade fait avancer puis reculer (et l'inverse est aussi vrai) ses mélodies, les détourne pour mieux les pousser dans quelques retranchements, leur faire faire un pas de côté pour mieux les voir prendre de longs raccourcis, quand il ne leur fait pas faire la grande traversée. Tout à la fois pop, rock, psyché, il intrigue, épate et parfois même émeut, que ce soit par la constructions de ses morceaux, pleins de couches et sous-couches qui s'empilent, s'emboitent, se répondent et se complètent, ou par ses mélodies sublimes. Le tout sans jamais perdre une seconde l'auditeur. Du grand Art.
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10. Richard Dawson - The Ruby Cord [Weird World]
Sur 'Peasant', Richard Dawson posait ses valises dans l’Angleterre du Moyen-Âge. Sur '2020', dans la même Angleterre mais à l’époque actuelle. Avec 'The Ruby Cord', il clôt son triptyque en se projetant dans un futur lointain. Et comme à chaque album, il le fait avec un incroyable sens de la composition folk, qu’elle soit longue et torturée (le premier titre fait plus de 40 mns !), ou qu'il s’engage dans des territoires plus orchestrés - qui rappelleraient presque par moment Sufjan Stevens - et aux choeurs majestueux. Une trilogie monumentale.
 

09. Freundliche Kreisel - Freundliche Kreisel [Stroom]
Très bien construit, évitant la redite et tenant son auditoire par des mélodies souvent cristallines que la voix de Karie Rich habille à merveille, voilà un album souvent minimaliste, plein de langueur et empreint d'expérimentations légères de la part d’un trio pour qui la scène expérimentale, ambiante et d’avant-garde n’a pas de secret. Un disque somptueux, captivant et enchanteur, à l’immédiateté assez folle.
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08. Team Me - Something In The Making [Propeller Recordings]

Avec Into The Wild et surtout Song For a Drummer lancés en éclaireurs l’an passé, il était presque sûr que les Team Me, de retour aux affaires, allaient satisfaire tous les amoureux de pop qui se respectent. Et de fait, avec ses mélodies en pagaille, ses refrains chantés à chœur plein et sa mélancolie doucereuse, 'Something In The Making' a souvent été un refuge pop ensoleillée tout au long de cette année 2022 pleine de grisaille. Un grand album dont il n’est pas facile de se passer.
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07. Panda Bear & Sonic Boom - Reset [Domino Records]

Entre titres de leurs compositions et samples à foison (Randy & The Rainbows, Everly Brothers, Eddie Cochran), Panda Bear et Sonic Boom plongent dans la pop et le rock de la fin des années 50 et du début des années 60, où trames répétitives, reverb, loops, clappings et autres touches synthétiques se tutoient, se mélangent, se complètent ou s'évitent tout à la fois, toujours avec justesse, sans que cela ne semble jamais forcé. Avec toujours cette ombre de Brian Wilson qui plane sur les élans vocaux de Panda Bear, en un peu moins de quarante minutes, le duo réussit sa première grande collaboration. 'Reset' est un disque qu'on qualifiera de pudiquement formidable, rétro dans ses fondations mais actuel dans ses finitions. Un album simple, lumineux à bien des égards, superbement produit - et sans doute le plus facile d'accès de la discographie de Panda Bear.
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06. Billy Woods - Aethiopes [Backwoodz Studioz]

Avec Preservation derrière la console qui amène autant de boucles répétitives, de samples que de productions venues de tous les continents sans que cela ne soit un frein à l'unité du disque, ramenant en studio quelques invités de prestige ne tirant jamais la couverture à eux (El-P, Quelle Chris), 'Aethiopes' de Billy Woods se révèle vite être un disque de hip-hop, souvent abstract, à la finesse et l'écriture impeccables. Très grand album.
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05. CMAT - If My Wife New I'd Be Dead [AWAL Recordings]

Souvent doo-wop, un rien cheesy, rappelant ces girl band des années 60, et avec une voix qui sait monter dans de belles hauteurs, l'Irlandaise CMAT (pour les initiales de son nom: Ciara Mary-Alice Thompson) aura été une des révélations de mon année. Avec son canevas country pop, elle alterne ici tubes, balades country et petites douceurs mélancoliques, avec de belles orchestrations qu'elle agence joliment en y cachant moult détails, des textes bien écrits, pas dénués d'humour (grinçant) et où se cachent souvent beaucoup de souffrances passées.
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04. Current 93 - If A City Is Set Upon A Hill [HomAleph]
Perdu de vue depuis 2014 et un 'I Am the Last of All the Field That Fell' sombrement beau et qui m’avait enchanté, Current 93 et David Tibet auront fait un retour remarqué dans mes oreilles en 2022. 'If A City Is Set Upon A Hill' est un disque somptueux, qui a les atours d’un disque neo-folk mais qui est bien plus que ça, et où ses mélodies lumineuses sur lesquelles David Tibet vient raconter ses histoires, font merveille.
 
 

03. Weird Nightmare - Weird Nightmare [Sub Pop]
Projet solo du leader de METZ, Alex Edkins, Weird Nightmare aura été un des disques qui aura le plus tourné cette année. Loin de la fureur de son groupe d’origine, on est ici entre garage-rock et indie où la pop a son mot à dire. Des compositions soignées, de la guitare en veux-tu, en voilà, des hymnes à chanter à tue-tête (Lusitania), ce premier album est impeccable de bout en bout. Immense coup de coeur.
 
02. Black Country, New Road - Ants From Up There [Ninja Tune]
Février 2022 ou « vie et mort d'un groupe ». Voilà ce qui pourrait être épitaphe de ce 'Ants From Up There' de Black Country, New Road, deuxième album mais le dernier avec son chanteur Isaac Wood qui, peu de temps après sa sortie, décidait pour des raisons de santé psychologiques de quitter ses six amis. Un choc tant sa voix en forme de montagnes russes, qui rappelle Bowie par moment, se marrie tellement bien avec ces compositions qui ici délaissent les guitares de 'For The First Time' (leur premier album) pour mieux exposer un côté folk-pop, aussi arty, orchestral que post-rock. Disque ambitieux et superbement composé, 'Ants From Up There' est en tout cas la mort d’un groupe. Son épitaphe. A lui de trouver leur nouvelle route pour ses aventures futures.
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01. Nina Nastasia - Riderless Horse [Temporary Residence]
 

C'est par quelques simples mots que Nina Nastasia est revenue aux affaires en avril dernier. Un texte pas loin d'être poignant qui explique les raisons de son absence pendant douze longues années. Elle y revient sur ses malheurs et sa très longue relation avec son producteur et compagnon qui n'a fait que de se détériorer au fil des ans, devenir malsaine, la coupant du monde, pour se terminer dans le drame, Nina Nastasia décidant finalement de le quitter, lui, préférant dans la foulée mettre un terme à ses jours.
Deux ans après les faits, l'américaine publie 'Riderless Horse', son septième album, et celui de mon année. Un disque très simple (elle est seule avec sa guitare) mais aux textes aussi touchants que durs, joyeux, tristes, bouleversants à bien des égards ; qui reviennent sur sa vie d'avant autant que sur ce qui s'ouvre devant elle. Comme elle le dit elle même : « Riderless Horse documents the grief, but it also marks moments of empowerment and a real happiness in discovering my own capability »
Produit par son ami de toujours Steve Albini, enregistré dans le plus simple appareil dans un phare, 'Riderless Horse' est l'album le plus dépouillé et à la fois le plus puissant de l'année. Sur Afterwards, le morceau qui clôt l'album, elle finit par ces mots : « Oh, how I wanna live ». Oh oui, vous pouvez madame. Vous devez même. Votre retour est une bénédiction. Bon retour à la vie Nina.
 
 
 
 
Comme promis, vous trouverez une chanson de chacun des disques présentés dans les lecteurs Spotify et Deezer et ci-dessous, avec également un lecteur bandcamp pour le morceau extrait de l'album de Current 93, absent des plateformes de streaming (de la place 01 à 20) :
 
 
 

mercredi 28 décembre 2022

Bilan 2022 : « Albums » (40-21)


Après les Ep, 45-tours et autres rééditions, continuons à dérouler les disques qui auront fait mon année 2022 en passant par la case albums. Comme chaque année, ils sont quarante au programme publiés en deux temps : ceux classés de la place 40 à 21 et vendredi, les vingt premiers.

Mais avant de plonger la tête la première dans ces albums là, comme le veut la coutume, voilà quelques liens à cliquer pour aller voir ce que d'autres ont tirés de 2022 :
- Le top 100 des albums de 2022 selon les précieux The Quietus
- Les choix de la rédaction et des lecteurs de Benzine
- Les 10 albums de Mind Riot Music
- Les 24 albums de l’année selon Bandcamp Daily
- Le top albums de la rédaction d'Addict Culture

Vingt albums disais-je donc. Vingt disques brillants, avec de vraies découvertes, des coups de coeur gros comme ça, du revenant, des chansons cachées depuis 11 ans, des réponses australienne au buzz du moment, des collaborations de légende, entre autres. Des disques de qualité qu'il a été difficile de ne pas classer plus haut (pour autant que ceci ait une quelconque importance) et qui m'auront accompagnés de longs moments en 2022 - et même quotidiennement pour certains. Et comme lire c’est bien mais écouter c’est mieux, en bas de ce papier se trouvent deux lecteurs Deezer et Spotify dans lesquels vous trouverez une chanson de chacun des albums cités ci-dessous. Bonne lecture, bonne(s) écoute(s) !



 
40. Swami John Reis - Ride The Wild Night [Swami Records]

Swami John Reis, sa carrière longue comme le bras comme leader d'une pelleté de groupes post-hardcore et rock, a décidé de se lancer en solo. En résulte un disque de trente minutes qui ne s'embarrasse pas de détails entre garage et power-rock, plein d’énergie, de fougue et de tubes à la pelle (la chanson titre pour ne citer qu’elle). Un album « continue à fond, on freinera quand on pourra toucher le virage du doigt », aussi immédiat qu'addictif.
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39. Peel Dream Magazine - Pad [Slumberland Records / Tough Love Records]Il y a dans les quinze chansons de 'Pad' un peu de Kings of Convenience pour la délicatesse de la voix, pas mal de pop des 60/70s (la pochette étant là pour le confirmer) et beaucoup de Beach Boys. Un très bel album aux airs d'un Burt Bacharach minimaliste, et qui évoque une sorte de sunshine pop rêveuse de fin d'été, quand le soleil tape moins fort, que les jours commencent à raccourcir et les soirées à rafraîchir


38. A Place to Bury Strangers - See Through You [DedStrange]

'See Through You' est le sixième album d’A Place to Bury Strangers et voit le trio de Brooklyn redevenir on ne peut plus intransigeant et bruyant au possible, avec une production au couteau, mais sans délaisser totalement ses élans « pop » récents. Un grand cru, noisy à souhait, évidemment.


37. Animal Collective - Time Skiffs [Domino Records]

Loin de la hype de leurs débuts, Animal Collective prouve avec 'Time Skiffs' à quel point le groupe a toujours ce petit truc en plus de composition, cette folie qui n'appartient qu'à eux - quand bien même beaucoup se sont inspirés de leurs travaux. Un album qui est une sorte de retour aux sources, un melting pot de 'Spirit They're Gone Spirit They've Vanished', 'Sung Tongs', 'Feels' et 'Strawberry Jam'. De la folk-pop sous acide, que l'on imagine dirigée par un Panda Bear, réel patron de l'organisation animale, d'où s'échappent encore des petits bijoux, si ce n'est bricolés, au moins tordus dans tous les sens.

36. Nyx Nótt - Themes From [Melodic Records]

Voilà un énième disque brillant par une des deux têtes pensantes d’Arab Strap. Un concept album totalement instrumental, centré autour de la télévision, où les huits morceaux retranscrivent l'idée qu'Aidan Moffat se fait des génériques d'émissions ou de films de télévision. Un ensemble de qualité, presque d'une autre époque, dont le meilleur résumé vient d’Aidan Moffat lui-même : « a walk through a neon Soho after a few cocktails ».


35. Field Medic - Grow your hair long if you’re wanting to see something that you can change [Run For Cover Records]

Sans conteste la plus belle « touche » (comme on disait quand j’étais ado) de l’année. Un très joli disque de folk, de pop et de folk-pop, bien achalandé (c’est la première fois qu’il a un groupe avec lui), triste mais beau, beau mais triste.
34. Jockstrap - I Love You Jennifer B [Rough Trade]

Premier album pour le duo Ellery/Skye et première réussite. Un disque d'avant-garde, d'art-pop, de glitch-pop (si tant est que ce terme existe), de balades sublimées, de r&b et d'électronica, plutôt fourre-tout mais à la cohérence remarquable.
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33. Marie-Flore - Je sais pas si ça va [6&7]

Totalement inconnue à mes oreilles jusque là, beau coup de coeur que la découverte de la parisienne Marie-Flore et de son troisième album. Difficile de résister à cette voix qui semble autant désabusée, trainante que sûre de ce qu’elle exprime, de ces mélodies mélancoliques et aux atours déprimés, et de ces textes souvent amers sur l’amour, les relations, la vie.


32. Steph Green - Thanks for That [Mashed Potato Records]

Une des très belles pochettes de 2022 pour ce disque qui a tout du mini-album (9 chansons, quelques 20 minutes) de la part de l’américaine Steph Green. Un 'Thanks for That' entre folk et rock à l'aura lo-fi délicieuse et qui rejoint le haut de la scène de songwriteuse qui ne cesse d’exploser depuis quelques années.
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31. The Mountain Goats - Bleed Out [Merge Records]

Avec pour pierre angulaire les films d’actions en tout genre et de toute époque qu’il a consommé en grande quantité au moment des confinements, John Darnielle a écrit un nouveau disque brillant pour ses Mountain Goats. Un concept-album sur les anti-héros, qui voyage entre pop joliment troussée, balades belles à pleurer et élans rock sacrément efficaces.


30. Hudson Mohawke - Cry Sugar [Warp]

De l'électro-trash à des sonorités qu'on dirait composées par Vangelis tout en faisant plus que flirter avec le rap, 'Cry Sugar' vous trimballe dans tous les sens, passe du tout au tout constamment, et n'en reste pas moins passionnant à bien des égards tout au long de ses 73 minutes et 16 morceaux.  Un disque qui ne vous met jamais dans le confort et vous prend à défaut à chaque titre.
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29. Pusha T - It’s Almost Dry [Def Jam Recordings / Getting Out Our Dreams]

Hip-hop, soul, funk sont au programme de cet album de Pusha T, disque incongru par sa durée (35 minutes, aucun remplissage) mais tellement délicieux de bout en bout. Un 'It's Almost Dry' venant avec son lot de featuring cinq étoiles (Kid Cudi, Jay-Z, Clipse) et une chanson majuscule, Dreaming of The Past, qui utilise un sample de la reprise de Jealous Guy de John Lennon par Donny Hathaway en 1972 et sur lequel Pusha T et Kanye West (compositeur du morceau) viennent rapper.


28. Bill Callahan - YTI⅃AƎЯ [Drag City]

Si les disques de Bill Callahan sont souvent de bonne facture, cela faisait presque dix ans que l’ancien Smog ne m’avait pas retourné à ce point. Un disque sublime, sans doute un de ses meilleurs, parcouru de titres majuscules (Naked Souls !), aux orchestrations léchées et à la poésie vibrante.
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27. Body Type - Everything Is Dangerous But Nothing's Surprising [Poison City Records]

Power-indie-pop aux accents punk, 'Everything Is Dangerous But Nothing's Surprising' est une sorte de réponse australienne à Wet Leg, de la part d’un quatuor féminin actif depuis six ans et qui ne s’en laisse pas compter. Gros coup de coeur.


26. Oceanator - Nothing's Ever Fine [Big Scary Monsters / Polyvinyl Record / Plastic Miracles]

Plein de petits hook pour relancer ses chansons, malin et jamais passéiste, 'Nothing's Ever Fine' est un disque qui fuzz, qui pop, aux guitares belles comme tout. Finalement, son seul vrai défaut sa pochette, lambda au possible et qui ne rend pas justice à cet excellent album qui dévoile une sacrée artiste dont on n'avait pas soupçonné jusque là tout le talent.
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25. Nas - King's Disease III [Mass Appeal]
Troisième volet de la série 'King’s Disease', cet album de Nas est en quelque sorte mes retrouvailles avec celui qui aura ambiancé ma fin d’adolescence. Un disque où tout est net et précis, où le flow est percutant et les productions classieuses, engageantes et même jubilatoires.


24. Rosalía - Motomami [Columbia Records]

Pas vraiment la cible première de ce genre d’albums, j’ai été totalement happé par la folie Rosalía. Il faut dire qu’il y a de quoi dans ce 'Motomami' où se mêlent autant de r&b que de hip-hop, de trap, de reggaeton que de flamenco revisité et servi à la sauce 2022. Un album pas loin d’être gigantesque et qui est brillant de bout en bout.
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23. Sea Power - Everything Was Forever [Golden Chariot Records]

Sans doute un peu zappé par tout le monde en cette période de bilan car sorti très tôt en 2022, ce retour des désormais Sea Power (ils ont abandonné le « British ») est pourtant grandiose. Nerveux à souhait, mélancolique comme jamais, aux deux voix toujours aussi complémentaires, 'Everything Was Forever' est un des meilleurs album du groupe jusque là. Quel retour !
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22. Danger Mouse & Black Thought - Cheat Codes [BMG]
Une association qui sur le papier faisait rêver : d’un côté Danger Mouse, producteur touche à tout. De l’autre Black Thought, patron avec ?uestlove de The Roots. Le résultat est sans appel : c’est évidemment brillant, produit à la perfection, au flow précis de Black Thought et aux invités de prestige (A$AP Rocky, Raekwon, Run the Jewels, Michael Kiwanuka, Joey Bada$$) dont MF Doom pour un featuring venu de l’au-delà.
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21. MGMT - 11•11•11 [MGMT Records]

Les disques « live » font rarement recettes chez moi. Et quand ils le font, ils n’atterrissent pas dans cette partie là du bilan. Sauf que ce live de MGMT y a toute sa place - et c’est dire sa qualité tant la réputation des new-yorkais est plutôt piteuse en matière de concert. Enregistré il y a onze ans, il ne contient QUE des inédits du groupe, jamais rejoués depuis, et composés spécialement pour une rétrospective consacrée au plasticien italien Maurizio Cattelan. Psyché, souvent hallucinatoire, '11•11•11' est un voyage aérien - parfois sous psychotropes que l'on prendrait par plaques de douze - que l'on ferait affalés dans des nuages douillets.
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Comme promis, vous trouverez une chanson de chacun des disques présentés dans les lecteurs Spotify et Deezer et ci-dessous (de la place 21 à 40) :


lundi 26 décembre 2022

Bilan 2022 : Top « 7", Ep & Rééditions »


Après avoir clôs la saison avec Rosie Thomas et Sufjan Stevens, il est temps de tirer le bilan de l'année 2022, comme le veut la tradition. Et comme ce n'est pas en vieillissant que je vais changer mon fusil d'épaule, ce bilan annuel se déroulera comme les années précédentes : en quatre temps. Il se terminera dimanche matin par mes cinquante chansons préférées de l'année pour ouvrir 2023 comme il se doit. Quelques jours avant sera publié un bilan des quarante albums qui auront fait mon 2022. Mais avant d'en arriver là, ouvrons le bal avec les meilleurs 45-tours, Ep et autres rééditions qui auront rythmés mes 365 derniers jours.

Mais comme je suis un homme de tradition donc, allons tout d'abord jeter un coup d'oeil chez le voisinage pour voir quel bilan ils ont tiré de 2022 :
- Le Top Album de la rédaction précieuse de Section26
- Les 40 meilleurs Ep de l'année selon Indie Rock Mag
- Les 20 meilleurs Ep de 2022 selon l'essentiel For The Rabbit
- Les 20 meilleurs Ep de l'année selon les tout autant essentiels The Revue
- Les 25 Ep de 2022 selon Stereogum

Et donc, sous mon chapeau perdu ? Une très belle année, aux 45-tours plein de grandes chansons, aux Ep remplis de promesses et annonciateurs de jours qui chantent pour leurs auteurs. Et des rééditions, ô que de bien belles rééditions, avec des retrouvailles qui séduisent et nous brisent le coeur à nouveau, une découverte française fameuse et un chef d'oeuvre réédité pour la première fois depuis sa sortie et qui, plus d'un demi siècle après, reste plus que jamais un chef d'oeuvre.
Tout est à lire/découvrir ci-dessous. Et comme lire de la musique c'est bien mais l'écouter c'est mieux, au bas de cette page se trouvent des lecteurs Spotify et Deezer pour écouter une chanson de chacun des disques présentés. Bonne lecture et bonne écoute !


Bilan 2022 :
Top 50 « Chansons »
Top 40 « Albums » : 20-01
Top 40 « Albums » : 40-21


7"
 
Lucy Dacus - Kissing Lessons 7" [Matador Records]
Et vous, c’était comment votre premier baiser ? Le sien, Lucy Dacus le raconte en moins de temps qu’il ne faut pour le dire (1'54" au compteur) dans la chanson titre de ce 45-tours, nerveuse à souhait où l’américaine fait montre une nouvelle fois de son talent pour raconter des histoires. Pour bien faire les choses, elle ajoute en face-B le délicat mais aux paroles sombres Thumbs Again
 
 
Lewsberg - Six Hills 7" [Speedy Wunderground]
Ce qui surprend le plus à l’écoute de Six Hills, c’est à quel point la production capitonnée, souvent brumeuse, qui allait bien au teint des Lewsberg a disparu. A la place, on a droit à un son puissant et carré. Et ca marche. One shot pour le label Speedy Wunderground de Dan Carey, faiseur de carrière par excellence, et sans conteste le titre le plus efficace et immédiat des néerlandais, qui ne renient rien de leur passé en changeant de braquet.


Sinaïve - Super 45T [Hidden Bay Records / Hellzapoppin Records / Arvo Disques]
Souvent croisés, rarement écoutés, j’aurais enfin pris le temps en 2022 de me mettre aux Sinaïve. Difficile il faut dire aussi de résister à ce 'Super 45T' du trio strasbourgeois, entre balade simple et belle, noisy-pop aux effluves sixties, shoegaze tendu et même un peu de Noir Désir de fin de carrière. De la belle ouvrage assurément, à la pochette belle comme tout.
 




Sprints - Literary Mind 7" [Nice Swan Recordings]
Grosse année pour les Sprints qui après un dépotant 'A Modern Job Ep' (voir plus bas) auront enfoncé le clou avec 'Literary Mind 7"' et sa chanson titre ambitieuse, qui déborde de guitares et au duel vocal imparable. Un titre qui voit les Sprints faire évoluer leur son, avec l'aide de leur producteur de toujours, le Gilla Band Daniel Fox. Un Literary Mind qui nous rapproche un peu plus du moment où le quatuor irlandais va exploser à la face du monde.


Sufjan Stevens - Fourth of July 7" [Asthmatic Kitty Records]
On l’oublie souvent mais Fourth of July est en train petit à petit de s’imposer comme une des plus grandes chansons de Sufjan Stevens. L’américain a décidé cette année de publier un 45-tours du dit morceau pour honorer les dix ans du décès de sa mère Carrie. Mais non en publiant le morceau original mais en en proposant deux relectures. Les grandes chansons restant magnifiques dans d’autres habits, Fourth of July ne déroge pas à la règle aussi bien dans sa version April Base (qu’on dirait venue d’une session de 'Seven Swans') que DUMBO. « We’re all gonna die » comme il dit. Mais en beauté.
 

The Reds, Pinks & Purples - Slow Torture of an Hourly Wage [-]
A chaque année ses chansons de The Reds, Pinks & Purples. Et parmi la myriade de singles qu’a publiés Glenn Donaldson en 2022, choisissons les trois chansons sorties sous le nom 'Slow Torture of an Hourly Wage'. Pas vraiment un 45-tours au sens strict du terme (les morceaux n’existent jusque là qu’au format digital) mais indéniablement un « disque » remarquable, mélancolique à souhait et à la jangle-pop déprimée.
Jane Weaver - Oblique Fantasy 7" [Speedy Wunderground]
Très gros coup de coeur de l’année, le single de la liverpuldienne Jane Weaver, chez les anglais de Speedy Wunderground, encore eux. Une chanson qui s’intitule Oblique Fantasy, qui occupe les deux faces du 45-tours, et dont la structure dynamique, qui ne relâche jamais son rythme, fait merveille. Cerise sur le gâteau, la voix de Jane Weaver, qui sublime une bien belle mélodie.

The Wedding Present - 24 Songs Project [Scopitones & Clue Records]
Sacré David Gedge, l’homme qui n’aime rien de plus que composer de nouvelles chansons. Au programme de ce projet, vingt-quatre nouvelles compos dispatchées sur douze 45-tours, un pour chaque mois de l’année. Le résultat ? Épatant pour dire le moins. Alors certes, il y a quelques face-b sans grand relief et si tout n’est pas extraordinaire, l’ensemble se tient sacrément. Et un tel projet, fou à une époque comme la nôtre, était à signaler.


EP

Antenn.e - A. Bogoliubsky, Chien Ep [-]
Second Ep pour ce trio lyonnais nommé Antenn.e et dont le titre 'A. Bogoliubsky, Chien' fait référence à un dignitaire « russe » du XIIè siècle. Un disque de six morceaux, aux quelques références Clash-ienne (on ne me fera pas croire que Cheers n’est pas un clin d’oeil), résolument post-punk et de très haute volée. Sacrément prometteur.
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Bambara - Love On My Mind Ep [Wharf Cat Records]
Avec ses allures de mini-album, cet Ep de Bambara est dans la continuité de 'Stray', leur excellent album de 2020. Le disque s’appelle 'Love On My Mind' mais est  loin du positif qu'on serait en droit d'attendre, tant les new-yorkais continuent de fouiller dans les noirceurs de l'âme et de raconter les vies de gens qui ont suivi une autre voie que celle que l'on avait tracé pour eux. Le tout entre deux riffs de guitares ou de langoureuses frappes de batterie. Avec trois chansons de plus de cette qualité, j'en aurais fait un des albums de mon année.


Sprints - A Modern Job Ep [Nice Swan Records]
Encore eux oui. Parce qu'avant de les voir évoluer sur un Literary Mind jouissif, les Sprints ont quelques mois auparavant sorti 'A Modern Job Ep', dans la continuité de leur 'Manifesto Ep'. Un quatre titres urgent et puissant, aux chansons mémorables (Delia Smith tout de même !). Ces jeunes gens vont aller très très loin.
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REEDITIONS


Broadcast - Maida Vale Sessions [Warp Records]
Broadcast - Microtronics Volumes 01 & 02 [Warp Records]
Broadcast - Mother Is the Milky Way [Warp Records]
Jamais vraiment remis de la disparition de Trish Keenan il y a bientôt douze ans, l’année 2022 aura été un petit bonheur pour les amoureux de sa voix et des compositions qu’elle façonnait avec James Cargill. Au programme, pas moins de trois rééditions. A commencer par la compilation ‘Maida Vale Sessions' ou quinze morceaux (dont une reprise de Nico en clôture) enregistrés à la BBC sur quatre sessions différentes (1996, 1997, 2000 et 2003) qui fait montre de la beauté qui irradiait de ce groupe. 'Microtronics Volumes 01 & 02' elle, est une compilation qui date de 2003, vendue uniquement lors des concerts du groupe pour la tournée de 'Haha Sound'. Un disque totalement instrumental, aux morceaux très courts, presque comme des gimmicks, mais où l'âme de Broadcast est bien présente. Enfin, 'Mother Is The Milky Way', un Ep de 2009, très onirique autant que weirdo (le mot anglais est ici le plus adequat), mais que la voix de Trish Keenan apaise toujours. Dieu qu’elle nous manque.
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Gwendoline - Après c'est gobelet! [Mega]
J’ai longtemps cru que ce premier - et jusque-là unique - album des rennais de Gwendoline allait être un de mes albums de l’année. Mais il s’avère que cet excellent disque date de 2020, publié à l’époque sur Dead Wax et que le label Mega a fort opportunément ressorti cette année. Certes, le tracklisting original est ici complètement chamboulé (et c’est peut-être d’ailleurs pour le mieux) mais la puissance de leur cold-wave et de leurs textes desespérés est tout à fait remarquable.
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Nancy & Lee - Nancy & Lee [Light in the Attic]
Il aura fallu 54 ans pour voir ce chef d’oeuvre réédité. Cinquante-quatre longues années pour profiter à nouveau de ce maître étalon dans tout ce qui touche au duo homme/femme en musique. Dans cet album merveilleux, découvert au hasard à l’époque où pour écouter tout ce que nous voulions Soulseek était la norme, il n’y a quasiment que des tubes (Summer Wine, Greenwich Village Folk Song Salesman), des mélodies pop tuantes un peu de partout et une alchimie incroyable entre les deux personnages qui s’attirent, puis s'éloignent pour mieux se séduire, se regarder par en-dessous et ne plus se lâcher des yeux. Chef d’oeuvre en 1968. Chef d’oeuvre en 2022.


Bilan 2022 :
Top 50 « Chansons »
Top 40 « Albums » : 20-01
Top 40 « Albums » : 40-21


Comme promis, une chanson de chacun des disques présentés se trouve dans les lecteurs Spotify et Deezer et ci-dessous: