Avec ses 85 ans au compteur, on pourrait penser que Brigitte Fontaine prendrait si ce n'est sa retraite, au moins du recul par rapport à la scène musicale qu'elle arpente depuis plus de soixante ans. Mais que nenni, la bretonne n'en a pas fini avec la musique vu qu'elle s'apprête à publier un nouvel album (son vingtième si mon compte est bon). Pour se faire, Brigitte Fontaine en a donné les clés à The Limiñanas qui s'occupe ici aussi bien de la musique que de la production.
Le disque s'appellera 'Pick Up', sortira le 25 octobre prochain et s'annonce avec Cantilène, une très belle chanson, composée en partie par Areski Belkacem (évidemment). Un morceau à la basse délicieuse, au piano puissant et mélancolique et qui parle de ce temps qui passe, de nos corps qui vieillissent, de cette mort qui se rapproche inexorablement, que Brigitte Fontaine chante d'une voix fatiguée. Superbe.
Fondé par la moitié de Ought, quatuor canadien remarquable signé chez Constellation mais muet depuis quasiment dix ans, Cola est quant à lui un trio qui essaie de se faire une place au soleil sur une scène post-punk actuelle particulièrement fournie. Pour l'instant, ils sont très loin de la notoriété de leur groupe précédent. Et pourtant ils ont des qualités à faire valoir.
Car sans pour autant publier des albums mémorables, Tim Darcy (chant, guitare), Ben Stidworthy (basse) et leur acolyte Evan Cartwright (batterie), en plus d'être de sacrés musiciens (il faut voir comment guitare, basse et batterie sonnent juste sur leur nouvel album 'The Gloss'), semblent avoir un truc en plus que beaucoup n'ont pas. Une intransigeance et un refus de la facilité dans leurs compositions, un minimalisme certain aussi (qui pourra en rebuter certains), un talent sûr pour mélanger leur univers post-punk avec celui moins corseté de l'indie-rock et une capacité à composer quelques chansons très mélodiques, rapidement marquantes, du genre de Pulling Quotes (en écoute aujourd'hui). Un morceau brillant, mid-tempo, ample, à la mélodie impeccable, où la guitare pleine d'éclats joue au chat et à la souris avec une basse profonde et une batterie métronomique. Une grande chanson à chercher quelque part entre les Parquet Courts et Car Seat Headrest.
Album : The Gloss Année : 2024 Label : Fire Talk Records
Le temps d'un album merveilleux, j'ai cru que je tenais là un nouveau groupe et qui allait m'accompagner un long moment. Nous étions en 2010, je venais de découvrir Future Islands et leur second album 'In Evening Air', disque perclus de grandes chansons (Vireo's Eye, Swept Inside, Walking Throught That Door pour ne citer qu'elles) et à la voix était envoutante et si marquante qu'il était difficile de ne pas succomber.
Et puis rapidement, je me suis rendu compte que rien ne ressemblait plus à une chanson de Future Islands qu'une autre chanson de Future Islands. Et l’enthousiasme de la découverte s'est mis mué en ennui poli puis en désintérêt - quasi - total.
Tiré des sessions de 'People Who Aren't There Anymore' (leur album sorti en janvier dernier dont on notera tout de même l'excellent King of Sweden), Glimpse est une chanson synth-pop, enlevée et au gimmick entêtant, qui le temps de 3'16" me réconcilie avec les Future Islands. Peut-être que ceux qui les suivent de plus près la trouveront tout à fait quelconque, mais pour quelqu'un comme moi qui passe à chaque fois en coup de vent sur leurs différentes sorties, je trouve la aussi efficace au possible.
Quatre ans après 'See You Tomorrow', The Innocence Mission n'en a pas fini avec le beau et le délicat - ces gens là ne savent rien faire d'autre de toutes façons. Preuve en est This Thread Is a Green Street (en écoute aujourd'hui), chanson d'ouverture et premier single de leur treizième album à venir le 29 novembre prochain, 'Midwinter Swimmers'.
Un morceau évidemment folk, mélancolique et beau (je vous ai dit pour le « beau » ?), dans la plus pure tradition du trio (le couple Karen et Don Peris au chant, à la guitare et au piano, Mike Bitts à la basse) mais qui prend une envergure assez inattendue - et tout à fait exquise - sur la fin. Avec toujours, planant au-dessus de la mélodie, la voix angélique de Karen Peris.
Album : Midwinter Swimmers Année : 2024 Label : Therese Records / Bella Union / P-Vine
Alors que les années s'accumulent sans qu'on nous ait prévenus au démarrage qu'il en serait ainsi, prenons en cette rentrée « officielle » de 2024-2025 une petite cure de jouvence adolescente (en tout cas la mienne) le temps des 4'38" de She's Leaving You, un des singles du quatrième album solo (à sortir ce vendredi) de MJ Lenderman, le guitariste de Wednesday.
Une chanson nineties à bien des égards, que ce soit dans sa mélodie, ses éclats de voix, le mix autour de celle-ci, ses paroles, la voix de Karly Hartzman, chanteuse de Wednesday, qui joue ici les choeurs de luxe, sa production et évidemment ses guitares qui semblent tout droit venir de 1994.
Un morceau qui a un je ne sais quoi de Pavement et de Jason Molina à la fois, mais qui malgré sa patine n'a rien d'un pastiche. Chanson remarquable, She's Leaving You est surtout incroyablement cool, touchante et dont la mélancolie me rendrait presque nostalgique d'une époque que je ne suis pourtant pas vraiment sûr de regretter.
Album : Manning Fireworks Année : 2024 Label : ANTI-