N’allez pas croire que je suis fan de revival, mais l’actualité est ainsi faite. Après du eighties «en veux tu en voilà je vous rajoute une guitare fuzz pour le même prix ma bonne dame?», voilà donc de la soul, choyée, cajolée, bichonnée par Stones Throw, un de mes labels préférés s’il en est (mais si vous suivez ces pages, vous avez du
vous en rendre compte).
Depuis quelques années, l’industrie de la musique a su s’engouffrer dans un revival black des plus enthousiasmants. Mené par l’incroyable
‘Back to Black’ d’
Amy Winehouse, aidés aux ailes par les finlandais des
The Soul Investigators, empli de légèreté par le surprenant
‘Rockferry’ de
Duffy, le courant a pris forme, et surtout soin de laisser sur le côté de la route les moins vrais du lot – tout du moins en grande partie. Surtout, il a confirmé que, selon moi, la soul est un courant phénoménal, peut-être le seul auquel le grand public n’adhère réellement que si la sincérité est présente.
De sincérité,
Mayer Hawthorne n’en manque pas. Dernier petit prodige sorti de l’écurie de
Madlib et de ses copains, ce blanc bec de 29 ans, et aux lunettes toutes carrées, est originaire d’Ann Arbor dans le Michigan. Un garçon initié très jeune à la black music par son père, féru du genre, et qui ne destinait aucunement à être chanteur mais plutôt musicien.
C’est d’ailleurs là que certains pourront trouver la petite faiblesse de ce
‘A Strange Arrangement’ , premier album du jeune homme: la voix. Une voix légère, au grain assez peu orthodoxe, loin des canons du genre. Précisons toutefois, qu'à mes yeux, elle devient rapidement un atout indéniable, une marque de fabrique, aux accents qui parfois rappellent le grand
Marvin Gaye.
Musicalement par contre, notre homme est renversant dès les premières notes. En faisant montre d’une loyauté sans borne envers cette soul qui l’a fait vibrer toute sa vie,
Mayer Hawthorne rappelle à lui tout l’imaginaire Motown, notamment celui des
Supremes (dur de ne pas penser à
You Can’t Hurry Love à l’écoute de
Your Easy Lovin' Ain't Pleasin' Nothin' et à
Baby Love sur
One Track Mind) mais aussi le fantôme de
Burt Bacharach (
I Wish It Would Rain notamment). Mieux il refait vivre cette période avec talent, sans vantardise aucune, avec une production soignée (une foultitude de détails, comme ces notes de guitare discrètes mais bien présentes à la fin de
The Ills par exemple), clappings, cuivres chaleureux et chœurs du meilleur effet.
Bref, il a tout d’un grand. Et si
‘A Strange Arrangement’ n’est pas le chef d’œuvre de l’année, il n’en reste pas moins un solide album de revival, par un jeune homme inspiré, dont les futures aventures discographiques seront très attendues sous mon couvre-chef.
Histoire de planter un point final à cette chronique et de vous prouver qu’il n’y a pas tromperie sur la marchandise, voilà ce que déclare
Peanut Butter Wolf, fondateur de Stones Throw, dj et producteur à ses heures, à propos de
Hawthorne:
«I think Mayer is the only artist in the history of the label that I’ve signed after hearing only two songs». Le genre de compliment qu’il est difficile d’occulter et qui vous pose un artiste.
(sortie: 9 septembre 2009)
Son :
Myspace (Deux chansons de ce ‘A Strange Arrangement’ en écoute)
Et en écoute, deux chansons, deux des plus belles. Le Burt Bacharach-ien I Wish It Would Rain et l’énergique The Ills (malheureusement plus en écoute).
Pour finir, deux clips. Le premier, celui de Just Ain't Gonna Work Out, titre sorti en single et gravé sur un vinyle rouge en forme de cœur (et qui est le point central de la vidéo). Et le second, celui de Maybe So Maybe No, qui surprend par son environnement actuel:
Mayer Hawthorne – Just Ain't Gonna Work
Mayer Hawthorne – Maybe So Maybe No