Initialement projet solo Ryan Lott, Son Lux est devenu depuis 2015 un projet à trois qui, à ma grande surprise il y a quelques années, connait un certain succès dans nos contrées. « A ma grande surprise » car j'ai depuis longtemps suivi plus qu'en pointillés la carrière des américains, leur pop étant devenue trop maniérée à mon goût et oubliant trop souvent la grâce qu'on avait pu découvrir sur 'We Are Rising' en 2011.
Pour autant, et comme sur 'Brighter Wounds', Son Lux a quand même le truc pour me charmer. La preuve avec A Different Kind of Love, nouveau single annonciateur de 'Tomorrows III', leur prochain album à venir en avril prochain et point final d'une trilogie, dont je ne sais rien, débutée l'an passée. Une chanson lascive au possible que d'aucuns diront affectée et grandiloquente, mais qui est surtout hypnotique à souhait et très bien arrangée.
Album : Tomorrows III Année : 2021 Label : City Slang
Pendant longtemps, Domino Records fut une de mes valeurs sûres, un refuge de disques dont les plus beaux étaient souvent cachés derrière les mastodontes qui tenaient le haut de l'affiche de l'écurie de Laurence Bell. Depuis quelques années pourtant, à quelques exceptions près évidemment, Domino me touche moins. Comme s'il manquait un élan dans les groupes ou les disques qu'ils produisent.
Les Australiens de Middle Kids seront-ils cette flamme nouvelle ? On en conviendra - ou non - le 19 mars prochain avec la sortie de leur second album, 'Today We’re The Greatest'. Mais d'ici là, on croisera les doigts que le reste du disque aura la même urgence pop que les premiers extraits déjà dévoilés. Notamment R U 4 Me? et surtout, Questions, superbe chanson qui a la pop en intraveineuse, les cuivres à faire fondre en bandoulière et les clappings exaltants.
Album : Today We’re The Greatest Année : 2021 Label : Domino Records
Fermez les yeux. Et imaginez. Une scène plongée dans le noir. Un silence total. Rien ne bruisse. D'un coup, quelques volutes de trompette s'élèvent dans la salle. Légères, délicates. Le machino enclenche le projecteur et met l'objet de ce délice sonore au centre d'une lumière diaphane. La mélancolie est prégnante dans ces premiers accords, la pop aussi. Très vite, un piano se joint à ces moments cuivrés : des notes éparses, feutrées, qui semblent baguenauder un temps, avant de prendre plus d'assurance à l'arrivée d'une batterie timide mais qui rapidement s'impose pour prendre l'espace. Le trio trouve ses marques, l'alchimie se crée. Avant que des « lalalala » agiles viennent apporter une touche vocale à cette atmosphère toute cotonneuse.
Les six minutes de jazz aérien de The Sound of Your Voice, Pt.1 viennent de se terminer et le charme du quatuor a déjà agi. La suite de cette promenade en apesanteur se fera sur la même tonalité, sur la même ambition ouatée. Avec toujours la trompette d'Airelle Besson en maitresse du temps et du tempo.
'Try!' fait partie de ces albums dont la beauté vous explose à l'oreille instantanément. Évidemment jazz dans sa couleur et sa conception, il respire la pop par tous les pores. Les morceaux Try! ou le culbuto Patitoune sont des exemples évidents. Mais plus globalement, il y a surtout ces inflexions dans les accords de trompette d'Airelle Besson ; ce touché délicat de Benjamin Moussay sur son piano, qu'il soit électrique ou non ; la voix d'Isabel Sörling, tantôt fredonnant, tantôt chantant, toujours comme en discussion avec la trompette de la cheffe de bande. Quant à la batterie de Fabrice Moreau, jazz en diable, elle épouse avec justesse les contours des divagations de ses trois acolytes.
Mais bien plus que ces questions, bien futiles, d'étiquettes, 'Try!' est surtout un album de musique plein de beauté de la part d'Airelle Besson et de son quartet. Un disque mélancolique sur bien des aspects, sautillant sur d'autres, pas corseté pour un sou et plein d'espace, où les mélodies n'oublient jamais de laisser respirer les chansons. Un voyage gracile et élégant, aérien et sensuel, ardent et allègre. Le
genre de disque qui vous fait vous demander pourquoi vous ne mettez pas
plus de jazz dans votre vie. (Sortie : 5 février 2021)
Trois morceaux de 'Try!' d'Airelle Besson en écoute ce soir. Tout d'abord, The Sound of Your Voice, Pt.1, qui ce papier et surtout l'album (en écoute également dans les playlists Spotify, Deezer et Youtube). Puis Try!, le morceau le plus pop du disque. Et enfin, le délicieux Uranus et Pluton :
Airelle Besson parle de son 'Try!' dans l'EPK ci-dessous :
Qu’est-ce qui a bien pu passer par la tête de Kìzis ? Et qu’est ce qui a pu bien prendre à Tin Angel Records ? Quelle folie a bien pu pousser tout ce beau monde à publier, en 2021, un album de près de 3h30 ? Oui, 3h23 pour être exact. Trente-six morceaux. Pour un seul album. Car on ne parle pas ici d'une compilation ou d'une réédition gorgée d'inédits, de face-b, de démos et de morceaux live. Non, on parle là d'un album avec un grand « A », dans son acception la plus noble. Une œuvre voulue et conçue comme telle. De 3h23. Et 36 morceaux donc. A l’heure où l’on nous explique que le taux d’écoute ne cesse de se réduire, que l’attention est en chute libre et que la si calibrée chanson de trois minutes vit sans doute ses dernières heures, la question mérite d'être posée. Avant qu'elle ne s'efface au fur et à mesure de l'écoute de ce 'Tidibàbide / Turn' proprement ahurissant.
Œuvre de Kìzis, jeune américano-amérindienne trans (américaine par sa mère, amérindienne de la tribu des Algonquins par son père), ce disque est un album aussi frappant que bouleversant, que ce soit dans sa conception, ses mélodies, ses chansons, son unité, sa facilité d'écoute ou les thèmes qu’il aborde (l'amour, la solidarité féminine, le fait d'être une femme, d'en devenir une, l'ouverture aux autres). Enregistré aux 4 coins du monde (Montréal, Londres, Berlin, Lima et Moosonee dans l’Ontario) - une gageure en 2020 et une folie de plus pour Kìzis, rempli d’invités plus ou moins célèbres (près de 70 au total, qui vont d’un simple chauffeur de taxi rencontré à Montréal à Owen Pallett), 'Tidibàbide / Turn' est un disque protéiforme, chapitré et construit autour des quatre parties du morceau Sister Flower (les quatre déclinaisons comptant pour 50mns du total). Chanté aussi bien en anglais qu'en algonquin, il balaie tout un pan de la musique (actuelle ou non), passant du folk shamanique au trip-hop, de la pop au spoken-word, de la techno au r'n'b, des chants traditionnels au jazz ou à l'electro-pop, que Kìzis mêle de voix célestes, de violons qui volettent comme du néo-classique, et d'arrangements soyeux - quand ils ne sont pas bricolés.
Alors oui, tout n'est pas impeccable sur 'Tidibàbide / Turn'. Il y a quelques morceaux si ce n’est moins inspirés, disons moins marquants - notamment au coeur de l'album. C'est légitime. Logique. Et même implacable : comment voulez-vous tenir le niveau pendant 3h23 ? C'est impossible. Et pourtant, Kìzis tient son cap comme personne, fait passer les titres plus faibles pour des respirations et arrive à embarquer l’auditeur dans sa folle aventure. Le voyage est tel qu’on se prend à imaginer une version visuelle de 'Tidibàbide / Turn' où Kizis déambulerait pendant 3h23 d’un long plan séquence, au son de ses chansons et de ses mélodies, rencontrant tous les intervenants du disque (et bien d’autres), tour à tour, dans une grande balade surréaliste et euphorisée, sans doute expérimentale mais qui n’en resterait pas moins, à l’image de sa musique, très accessible et jamais ennuyeuse.
Car c'est cela qui impressionne le plus sur 'Tidibàbide / Turn'. La plupart des albums de ce type sont souvent trop jusqu'au boutiste dans leur son ou leur ambition pour passionner tout un chacun. Ici, du chant traditionnel Dawemà qui ouvre la danse à Nika qui éteint les lumières 203 minutes plus tard, tout découle facilement. Kìzis balade son monde à coups de piano, de violoncelle, d’alto, de cuivres, de guitares, de saxophones, de boites à rythme et autres éléments plus synthétiques et électroniques, enivre par sa singularité, charme par la vivacité de ses chansons et de ses mélodies et épate par l'homogénéité de sa création.
Reste une grande question : qui aura le temps d'écouter ce disque ? De prime abord, personne. Pourtant, il faudrait. Et il va falloir. Car, rappelons le, on a toujours le temps, il suffit juste de vouloir le prendre et de se l’octroyer. 'Tidibàbide / Turn' et Kìzis méritent qu’on fasse ce choix ; des albums obsédants et aussi ouverts sur le monde et les autres ne courent pas les rues. Et celui-ci est de cet acabit là. Un projet comme ça ne devrait pas tenir une seconde la distance. Devrait se ramasser en route. Et s'écrouler sous le poids de son ambition démesurée. Et puis non. Pas ici. Pas maintenant. 'Tidibàbide / Turn' est un disque monstre. Un disque monde. Un miracle. (Sortie : 12 février 2021)
Exceptionnellement, quatre morceaux en écoute de ce 'Tidibàbide / Turn' de Kìzis (à la sélection réduite, tous ne pouvant être partagés ici). Ouvrons le bal avec Kiss For The Valley (en écoute dans les playlists Spotify, Deezer et Youtube), sorte de grande messe folk pleine de chœurs. Enchainons avec Redbody, superbe chanson d'electro-pop aux violons enivrants. Continuons avec le rêveur et magnifique Tebwewin. Et finissons avec le très dance In Our House :
Difficile d'extraire, si ce n'est un single, au moins une chanson de cet album dantesque. Tin Angel Records et Kìzis ont opté pour Amanda, placé en 15è position de 'Tidibàbide / Turn'. Difficile de leur donner tort :
Malgré sa grande qualité, tout porte à croire que 'Beyondless'n'a pas connu le succès escompté par Matador, vu que c'est sur Mexican Summer qu'Iceage sortira son cinquième album. Curieux tout de même tant les danois se sont construits au fil des années une discographie de très - très - haute tenue.
Quoiqu'il en soit, 'Seek Shelter' devrait sortir le 7 mai prochain avec Sonic Boom à la production. Et cela promet mais surtout s'entend sur Vendetta, dernier single en date, sorte de blues glauque et poisseux, imposant, puissant et agressif, que, comme à son habitude, Elias Bender Rønnenfelt chante à merveille. Surtout, Vendetta prouve à nouveau qu'Iceage n'a toujours pas l'intention de se contenter de ce qu'il maitrise et préfère continuer d'évoluer. Quel groupe passionnant.
Quatorze ans. Il m'aura fallu près de 14 ans et plus de 1600 billets pour évoquer dans ces pages Jean-Jacques Goldman, un de ces artistes qui me restent de mon enfance/adolescence et pour les disques duquel j'ai une profonde affection. Un artiste qu'un jour on considèrera à sa juste valeur et non pas simplement que comme un simple chanteur de variétoche aux chansons guimauves.
Mais pourquoi donc Jean-Jacques Goldman aujourd'hui me direz-vous ? A cause de Jumbo, duo bristolien composé de Joe Sherrin et Kane Eagle qui vient de sortir deux nouveaux singles, Chump et Mute. Et notamment à Mute justement, chanson à l'écoute de laquelle il est difficile de ne pas penser à la mélodie d'Ensemble, qui ouvrait le dernier album du français préféré des français (disque au nom débile d'ailleurs, 'Chansons Pour Les Pieds', mais qui sans être un chef d’œuvre loin de là valait bien mieux que ce que certains journalistes faussement punk avaient bien voulus en dire à l'époque). Ensemble n'est sans doute pas la meilleure chanson de JJG mais tout de même, pas la plus vilaine non plus. Et sa mélodie qu'on croit reconnaître à chaque début de refrain ici sied plutôt bien à ce Mute de Jumbo. Souviens toi, était-ce mai, novembre...
Album : Chump / Mute Single Année : 2021 Label : -
Si d'aventure l'expérience boygenius ne devait pas connaître de suite, nul doute qu'on continuera à en entendre des bribes ici et là au détour des albums de Phoebe Bridgers, Lucy Dacus et Julien Baker, derrière ce super groupe responsable d'un Ep épatant en 2018. Car chacune des trois artistes invitent les deux autres à venir participer, même de façon anecdotique, à leur album solo.
Dernier exemple en date avec Julien Baker, qui va donner suite à son 'Turn Out The Lights' de 2017 à la fin du mois avec 'Little Oblivions'. Un disque qui sera sans doute plus orchestré mais qui devrait continuer à être émo en diable, et sur lequel on retrouvera notamment Favor (en écoute aujourd'hui), une très belle chanson déprimée où Phoebe Bridgers et Lucy Dacus viennent assurer les chœurs sur chacun des refrains. Ces trois là sont décidément inséparables.
Album : Little Oblivions Année : 2021 Label : Matador
En plus des playlists Spotify, Deezer et YouTube, Favor de Julien Baker, avec Lucy Dacus et Phoebe Bridgers aux chœurs, est également en écoute ci-dessous :
Et si vous voulez chanter les paroles de ce Favor de Julien Baker, ce clip pourrait vous être utile :
A deux jours de la Saint Valentin, plutôt que ressortir un quatrième Top 6 « break-up songs » - bien que l'idée m'ait traversé l'esprit -, lançons nous à la découverte de Silver Strands, le projet de Nathan Beale, californien de son état, et de sa dernière chanson en date, We Could Be Love. Un morceau à la mélodie aérienne que les guitares et les voix en écho n'aident en rien à ramener sur terre.
Et s'il manque un « d » à « love » pour en faire la chanson parfaite pour exprimer concrètement la difficile période de solitude obligée qui nous est imposée, prenons le parti de prendre au mot Silver Strands. Et d'être amour ; au moins un instant. Oui, « We could be love, we could be love, we could be, if we want to ». C'est peu mais sans doute déjà mieux que rien en ce moment.
NB : Trois « Top 6 break-up songs ». Ils sont disponibles en cliquant là : vol. 1, vol. 2 et vol. 3.
Album : - Année : 2021 Label : Infinity Records
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En plus des playlists Spotify, Deezer et YouTube, We Could Be Love des Silver Strands est également en écoute ci-dessous :
Emballé comme un Ep, 'Before The Road', ses 25 mns et ses 7 titres est en fait un album, le sixième de Motorama, groupe russe toujours très aimé dans ces pages malgré sa propension à tourner plus ou moins en rond.
Car c'est un fait, le Motorama des débuts (et notamment de 'Calendar' en 2012) est passé et le groupe évolue sans vraiment évoluer et décline plus ou moins les mêmes mélodies, les mêmes chansons et son indie-pop à guitares faite de wave et de cold. Pour autant, on a beau savoir ce qu'on va entendre, on a beau savoir que le Motorama de 2021 sera sans doute moins bon que le Motorama de 2016, lui même déjà moins bon etc..., le charme opère toujours. Que voulez-vous, on ne décide jamais d'apprécier un groupe ou de s'en détacher. On l'aime ou il nous lasse. On est porté par ses mélodies et ses chansons ou l'on s'y ennuie à leurs écoutes. Mais on le fait rarement de plein gré.
'Before The Road' n'est sans doute pas le meilleur album de Motorama, mais on y retrouve tout ce qui nous plait chez eux, leurs guitares toujours en avant, et leurs mélodies sombres et dépressives. Avec peut-être un côté plus pop cette fois. Ceux qui aiment le groupe aimeront ce disque. Les autres peuvent d'ores et déjà passer leur chemin.
Album : Before The Road Année : 2021 Label : I'm Home Records
Un couple, elle qui n'en peut plus de son mec (« Grow the fuck up dude, what the fuck »), lui qui n'a rien à faire de ses reproches, ne pense qu'à sa gueule et a même conscience de se comporter comme un sale con (« I do, do what I please I'm a piece of shit, I just think I'll get away with it ») et bien plus que ça (« Now you're hiding out in my house, get the fuck out »).
Voilà l'histoire de Schatze, nouveau single d'Ohtis, un trio de l'Illinois qui fait habituellement dans le folk/americana mais qui ici lorgne plutôt sur un rock nerveux auquel se marient quelques synthés pour éclairer tout ça. Une chanson sur laquelle le groupe invite l'américaine Stef Chura à venir s'invectiver avec lui, et avec Sam Swinson (chanteur et leader du groupe) en particulier, pour un duo des plus réussis entre lassitude, griefs et sarcasme. Comme elle le dit elle-même : « fuck you very much sir ».
Album : Schatze 7" Année : 2021 Label : Saddle Creek
Leader des ô combien aimés ici The Pains of Being Pure at Heart, Kip Berman a mis un terme à son aventure shoegaze/indie-pop il y a près de 2 ans pour mieux se lancer dans une carrière solo, assez loin de ses premières amours.
Éparse et discrète jusque là ('Know Me More Ep' (en 2018) et une reprise délicieuse de Dear Nora, formidable groupe de Portland découvert à cette occasion), elle va prendre un peu plus de consistance avec 'Tethers' (« attaches » en français), premier album de 9 chansons et qui s'ouvrira par Why Don't You Come Out Anymore? (en écoute aujourd'hui), sorte de folk-rock teinté d'orgue bien plus nerveux que ses élans solos précédents - plus nus et intimes - mais à la mélancolie implacable.
Une chanson qui, je l'espère, saura accompagner comme il se doit dans sa dernière demeure Maurice, un de ces hommes qui jalonnent notre enfance et même un peu plus que ça. Le genre de gars bourru mais drôle, adorable et exigeant, respecté et respectable et qui est finalement parti il y a quelques heures pour un monde qu'on lui souhaite des plus doux. Il le mérite mille fois.
Album : Tethers
Année : 2021 Label : Kanine Records/ Dirty Bingo Records
Savoir se faire oublier pour mieux attiser les attentes. The Notwist l'a bien compris, eux qui depuis la sortie de 'Neon Golden' en 2001 n'auront sorti que 4 « vrais » albums en 20 ans (je mets de côté leur live 'Superheroes, Ghostvillains + Stuff' en 2016, l'instrumental 'The Messier Objects' et la BO du film Storm en 2009). 'Vertigo Days' est le quatrième - le premier en sept ans - et voit The Notwist encore emballer son monde. La faute à un album brillant et à un démarrage parfait : un Al Norte qui craque, à la rythmique répétitive et à l'ambiance rêveuse, que quelques notes claires de piano viennent interrompre abruptement et lancer un très Notwist-ien Into Love / Stars à la lente progression avant que Exit Strategy to Myself (en écoute aujourd'hui) ne sorte les guitares au meilleur des moments pour mieux finir de nous faire comprendre que nous ne sommes pas face à un disque qui n'a rien à dire ni à faire valoir.
Le reste de l'album, malgré sa longueur, sera du même tonneau, voyant The Notwist faire ce qu'il sait faire de mieux (à savoir pondre des mélodies lumineuses et mélancoliques, les emballer dans une poptronica reconnaissable entre mille sur laquelle vient se poser la voix éthérée de Markus Archer) tout en ajoutant à son arc un peu de trip hop (Oh Sweet Fire avec Ben Lamar Gay au chant) et des influences toutes droit venues du projet Spirit Fest (Saya de Tenniscoats est d'ailleurs de la partie sur Ship) qui donne un touche très personnelle à l'ensemble et le fait s'éloigner des sonorités plus nerveuses de son illustre prédécesseur 'Close to the Glass'.
Il aura donc fallu sept années pour que The Notwist trouve le chemin vers la suite de ses aventures discographiques. Et cela valait l'attente. Car 'Vertigo Days' est un vrai beau voyage, à la diversité certaine et à l'unité impeccable, où les chansons entrelacées s'enchaînent avec une classe folle. Un disque qui n'oublie ni la mélancolie, ni les mélodies accrocheuses. Il fallait bien cela pour fêter - aussi surprenant que cela puisse paraître vu que le label allemand est la maison mère de quelques uns des projets parallèles du groupe - leur premier album chez Morr Music. (Sortie : 29 janvier 2021)
Trois chansons de 'Vertigo Days' de The Notwist en écoute aujourd'hui. Exit Strategy to Myself et ses réminiscences de 'Close to the Glass' avec ce riff qui arrive comme dans un rêve (en écoute également dans les playlists Spotify, Deezer et Youtube). Puis Loose Ends à la sublime mélancolie. Et enfin Into Love Again (avec la présence de Zayaendo), dernière chanson de l'album, où l'influence de Spirit Fest se fait grandement sentir :
Souvent torturés, bigarrés et concassés, les disques de Xiu Xiu (désormais composé de James Stewart et Angela Seo) peuvent, si ce n'est effrayer, au moins rebuter. Mais le prochain album devrait être tout autre. C'est en tout cas ce que penser A Bottle of Rum, le premier single. Une chanson pop par excellence, rêveuse, lancinante, à
l'ambiance presque lourde où le mariage des voix de James Stewart et de
Liz Harris (la femme derrière Grouper) fait merveille ; elle tenant le micro tout du
long, lui laissant sa voix se balader autour, s'évaporer pour mieux réapparaitre.
Et au-delà de ce premier extrait épatant, la suite promet beaucoup également. Car 'OH NO' sera un album de duos
où Xiu Xiu a réuni une belle flopée de Chelsea Wolfe à Sharon Van Etten, d'Owen Pallett à Twin Shadow, en passant par Deerhoof et Liars. Entre autres. Un casting de luxe qui dévoilera ses chansons et ses voix
le 26 mars prochain. Pile ce qu'il fallait pour sortir enfin de l'hiver.
Quand bien même 'Songs of Praise' était un premier album sympathique (mais dont il ne me reste rien ou pas grand chose), je n'aurais pas parié un penny sur la capacité de Shame à sortir un second de cet acabit là. On parle souvent d'« album de la maturité » à tort et à travers, mais il faut bien avouer que l'expression prend tout son sens à l'écoute de ce 'Drunk Tank Pink' : plus fort, plus malin, plus homogène (la production de James Ford n'y est sans doute pas étrangère), plus torturé, plus déroutant aussi, avec un post-punk fait de ruptures imprévues, qui part se faire cabosser dans tous les sens par du math-rock et des moments presque hardcore (l'enchainement 6/1 et Harsh Degrees), qui n'oublie jamais un côté pop qui lui va bien et ne laisse véritablement respirer l'auditoire que le temps des superbes Human, For a Minute et Station Wagon.
Au final, au contraire du deuxième album l'an passé de leurs homologues irlandais de Fontaines D.C. qui se voulait être un virage « adulte » mais sonnait trop faux pour être sincère, Shame remet tout à plat, change de braquet et d'ambition (la pochette magnifique en est une preuve implacable) et sort un disque aussi puissant que réjouissant. Qui l'eût cru ?
Album : Drunk Tank Pink Année : 2021 Label : Dead Oceans
Pour un premier album, les suédois de Not Even Close n'auront fait pas dans l'épate mais plutôt dans le concis avec ce 'Lemons' et ses 20 minutes pour 9 chansons. Assez cependant pour pondre un très chouette Dad Caps, genre de mini-tube qui coche toutes les cases du genre - et de belle façon. Peut-être pas assez pour rendre ce 'Lemons' et sa power-pop-emo remarquable, mais tout de même recommandable : il y a ici quelques autres chansons qui méritent l'écoute (Codependency ou Coloured Turpentine).
Révélation de l'an passé (douze mois trop tard) avec 'Football Money', les Kiwi Jr. allaient-ils réussir leurs débuts dans les rangs du prestigieux roster Sub Pop ? La question était légitime tant les groupes auteur d'un premier album épatant et qui se crashent en passant dans une autre dimension sont légions. Mais Kiwi Jr. est un quatuor d'un autre acabit : des branleurs talentueux et qui ne sont pas là par hasard.
Et qui le prouvent avec 'Cooler Returns' - leur second album et leur premier pour l'écurie de Seattle. Et ce dès les premières notes de Tyler, la chanson d'ouverture, où une mélodie accrocheuse, la voix de Jeremy Gaudet si Malkmus-ienne, son piano rétro qu'on dirait sorti d'un cabaret hameçonnent l'auditeur.
A partir de là, tout ne sera que formalité et le reste à l'avenant : de chansons courtes mais maitrisées et allant à l'essentiel ; qui naviguent entre jangle, indie et power-pop ; un trio guitare/basse/batterie qu'ils accompagnent autant de piano, d'harmonica, que d'orgue ou d'accordéon ; des paroles drôles et délirantes, sarcastiques et ubuesques, mais toujours bien trouvées et où la pop culture n'est jamais loin ; et même un clin d’œil appuyé (ceci ne peut être fortuit) à Pavement sur Only For a Haircut, sorte de Cut Your Hair avec la mélodie de Range Life.
Un disque finalement plus sérieux dans son écriture que voudrait le faire croire son côté slacker et surtout immédiat, qui, contrairement à beaucoup dans le même cas,
tient la longueur des écoutes tant bon nombre de chansons prennent
une nouvelle dimension à chaque fois. Et une nouvelle fois, le disque
que Stephen Malkmus rêve d'écrire depuis 20 ans.
Album : Cooler Returns Année : 2021 Label : Sub Pop
En plus des playlists Spotify, Deezer et YouTube, Tyler de Kiwi Jr. est également en écoute ci-dessous :
Autre chanson de ce nouvel album de Kiwi Jr., voilà Cooler Returns, la chanson titre :
En plus d'Undecided Voters, trois autres singles ont été tirés de 'Cooler Returns' de Kiwi Jr. : Cooler Returns, Maid Marian's Toast et Waiting In Line, dont les clips sont à découvrir ci-dessous :