'Velvet Serenade', c'est l'histoire d'un groupe mythique, The Velvet Underground, dont l'importance fut telle qu'elle a donné lieu à une anecdote, devenue maxime avec le temps, qui veut que chaque personne qui a acheté l'album à la banane à l'époque a monté un groupe par la suite. Un groupe majeur des années 60, créé sous la coupe d'Andy Warhol et qui va faire naitre trois artistes majeurs : John Cale, Nico et
Lou Reed.
'Velvet Serenade', c'est l'histoire d'un livre, 'Linger On: The Velvet Underground' du journaliste espagnol Ignacio Juliá, qui entre 1978 et 2022 a interviewé tous les membres du Velvet Underground et en a fait un livre, une somme même, que l'auteur considère être définitive à propos du groupe et de ceux qui l'ont composé.
Mais pour boucler la boucle et aller au bout de son idée, Ignacio Juliá a également souhaité, selon ses propres termes, « relive the New York band's original dynamics, that creative
friction between an American noise guitare player and a poet, Lou Reed,
and a radical, lyrical European pianist and songwriter, John Cale ». Alors quelques mois avant la publication de son livre, il a eu l'idée de rendre musicalement hommage au groupe en demandant le concours de Pascal Comelade et Lee Ranaldo de Sonic Youth (pas le dernier admirateur du Velvet), rapidement rejoint par le batteur Ramon Prats. D'où la naissance de 'Velvet Seranade'. La résultante de tout cela. Son
aboutissement.
Matérialisé le temps de quelques
répétitions et d'un unique concert à Banyoles en Espagne en avril 2022, ce « live » (qui ne sonne pas comme tel) voit donc un trio connaisseur, dévoué et
talentueux rendre hommage au Velvet Underground et,
notamment, à Lou Reed (sur les six chansons, cinq
ont été écrites par Reed ; la sixième, Lou's Blues est une composition de Lee Ranaldo) en tout juste 35
minutes.
Mais qu'il n'y ait pas de méprise : 'Velvet Serenade' n'est pas un simple disque de reprise du Velvet Underground (comme l'indique d'ailleurs dans le livret de l'album Ignacio Juliá : « The three constructed what I had asked for, not a tribute concert made of more or less faithfull covers but a new thing »). Plutôt une relecture de l’œuvre des new-yorkais, un peu à l'image de sa très belle pochette, hommage à Andy Warhol, dont les photos sont tirées d'un film de 1977 d'Ignacio Juliá où il était déjà question du Velvet.
C'est All Tomorrow's Parties qui ouvre notre affaire dans une version très dénudée et instrumentale (comme quasi tout le disque), mené par les claviers lumineux de Pascal Comelade pendant que l'orage s'annonce derrière. Orage qui débaroule sur What Goes On, où les guitares viennent faire la nique à un piano martelé, avant que que I’m Waiting for the Man s'annonce dans une version très répétitive aux larsens bien sentis. Lou's Blues est presque une respiration (qu'on aurait bien vu chanté par Jeff Buckley d'ailleurs), un blues évanescent et aérien. Puis Ocean, chanson du premier album de Lou Reed mais qui aurait pu (du ?) se retrouver sur 'Loaded' du Velvet Underground, voit Lee Ranaldo prendre le micro d'aise et avec ses deux acolytes donner une version des plus Velvetienne à l'ensemble, avec un Ramon Prats faisant sonner ses cymbales et un Pascal Comelade affûtant ses claviers pour mieux les sublimer sur l'immense Femme Fatale, dernier morceau de 'Velvet Serenade', dans une version à la beauté évidente, aux quelques côtés déstructurés mais qu'on aurait rêvé avoir comme compagnon de sommeil lorsque nous étions enfants.
Les dernières notes s'évanouissent à peine que la conclusion est implacable : 'Velvet Serenade' n'est rien d'autre qu'un des plus grands disques hommage à l’œuvre du Velvet Underground jamais sortis. Car il réinvente leurs chansons, les fait passer par d'autres états et montre à quel point elles sont intemporelles et sont d'immenses compositions. N'étant pas un spécialiste de la bande à Warhol, je ne sais pas ce qu'en penseront les puristes. Mais j'ai du mal à ne pas croire que Lou Reed et ses anciens comparses n'aient - ou n'auraient - pas aimé cette réinvention de certains de leurs classiques. Immense disque. (Sortie : 5 mai 2023)
Plus :
'Velvet Serenade' de Pascal Comelade, Ramon Prats et Lee Ranaldo est à l'écoute sur le bandcamp de Staubgold
'Velvet Serenade' de Pascal Comelade, Ramon Prats et Lee Ranaldo est à l'achat sur le bandcamp de Staubgold
'Velvet Serenade' de Pascal Comelade, Ramon Prats et Lee Ranaldo est en écoute, notamment, sur Spotify et Deezer
Trois morceaux de 'Velvet Serenade' de Pascal Comelade, Ramon Prats et Lee Ranaldo en écoute aujourd'hui. What Goes On (parue sur The Velvet Underground en 1969) ouvre le bal, avec son délicieux attelage clavier/guitare (en écoute également dans les playlists Spotify, Deezer, YouTube et dans la colonne de gauche du blog). Puis la longue relecture de Ocean. Avant de finir par la sublime version de Femme Fatale :