Basse ronde à faire décoller du sol, voix trainante avec un rien de reverb pour lui donner un peu de plus de profondeur, orchestration soyeuse et léchée aux cordes comme des caresses, production ouatée : A Place To Stay de Sam Burton est une sorte de voyage allongé sur un nuage, un peu dans les vapes et l'esprit plein de rêves légers.
Dernière chanson de 'Dear Departed', elle est même à son image. Car si tout l'album n'est pas de l'acabit de ce morceau, il en a les mêmes saveurs sixties/seventies, les mêmes ambiances cotonneuses qui cajolent et rassurent, et qui rappellent par moments Rodriguez, disparu il y a quelques jours. Un disque charmant en tous points tout et dans lequel on aimera s'abandonner aux cordes enveloppantes.
Album : Dear Departed Année : 2023 Label : Partisan Records
Ce vendredi 1er septembre, le journaliste Christophe Schenk publiera dans la collection Discogonie "Bonnie 'Prince' Billy - I See A Darkness", soit un essai sur l'album majeur de l'américain Will Oldham - le premier publié sous l'entité Bonnie 'Prince' Billy. Un disque pas là pour faire rire ni réjouir les cœurs et sur lequel on trouve la chanson titre, un des morceaux les plus sombres jamais publiés, sur lequel la mort semble rôder dans tous les coins à mesure que le barbu égrène ses paroles.
'I See A Darkness' date de 1999. Vingt-quatre ans plus tard, l'aura de Bonnie 'Prince' Billy a fini par s'émousser, lui qui fut longtemps aussi bien héros que héraut d'une scène folk/country dont il était l'un des - si ce n'est le - patrons. Pourtant, l'américain continue sa carrière, comme si de rien n'était, en publiant des albums à un rythme très régulier (au moins un tous les ans), qu'il
soit seul ou en compagnie d'autres musiciens (Bill Callahan, Matt Sweeney, Bryce Dessner ces dernières années).
Dernière sortie en date, 'Keeping Secrets Will Destroy You', sorti chez les fidèles Drag City. Et sans doute un de ses plus beaux disques récents. Un album simple, aux atours country-folk, avec sa voix et sa guitare au centre de tout, avec en soutien la voix de Dane Waters et quelques arrangements légers et léchés (quelques cordes par ci, un orgue ou un cuivre par là) souvent en périphérie, parfois plus centraux, et qui savent toujours embellir sans jamais alourdir. Un album au dénuement partiel mais délicat, souvent touchant et qui s'ouvre par une chanson tout à fait remarquable, Like It or Not (en écoute aujourd'hui), sur laquelle Bonnie 'Prince' Billy avance ses pions au fur et à mesure pour mieux lui faire prendre une bien belle ampleur.
Album : Keeping Secrets Will Destroy You Année : 2023 Label : Drag City / Domino Records
De l'intérêt d'écouter un disque jusqu'au bout, même quand celui-ci ne nous renverse pas. Maintes fois répété dans ces pages, ce principe vient à nouveau de faire ses preuves avec 'The Window Is The Dream', le second album de Jana Horn, compositrice originaire d'Austin au Texas. Un disque aux quelques jolis moments mais pas assez pour être remarquables ou renversants. Jusqu'à sa dernière piste, The Way It Was.
Tranchant avec le reste de 'The Window Is The Dream', l'américaine nous fait rentrer ici dans l'intime. Une chanson de tout juste deux minutes, racontant un amour contrarié aux regrets désolés («
We thought it was love. Turned out to be something else. Turned out to
be something that went on for longer than it ever should have been »), qui met de côté l'ambiance générale de l'album et sa production ouateuse pour ne laisser plus que la voix de Jana Horn (plus proche et mise en avant, à tel point qu'on pourrait sentir ses lèvres bouger) et quelques notes mélodieuses et éparses pour l'accompagner. Une beauté mélancolique qu'elle susurre presque et qu'on croirait capable de briser quelques cœurs bien accrochés.
Album : The Window Is The Dream Année : 2023 Label : No Quarter Records
'And Their Refinement of the Decline' fait partie de ces albums à la beauté aussi immense qu'incroyablement rare. Un disque épuré autant que profond, d'une délicatesse et d'une grâce folle, dont, malgré les années et l'amour infini que je lui porte, je n'ai toujours pas réussi à faire le tour et à en déceler tous les secrets. Cet album, sorti en 2007, est le dernier en date de Stars Of The Lid, duo composé d'Adam Wiltzie et Brian McBride. Et aussi leur apogée.
En 2017, après des années de silence, les deux américains s'étaient reformés le temps d'un concert à Reykjavik. Et puis plus rien. Jusqu'à ce dimanche 27 août où est tombée l'annonce du décès de Brian McBride à l'âge de 53 ans seulement ; fermant par la même toute idée de nouvelles aventures oniriques et ambiantes.
Jusqu'à hier soir, je n'avais jamais vu à quoi ressemblait Brian McBride. Mais je ne pense pas que le savoir était bien utile tant la musique de Stars Of The Lid se suffisait à elle-même, le plus important se trouvant dans la cathédrale sonore qu'ils avaient décidé d'élever tout au long de leur décennie d'activité. Et quelle bâtisse ! Cette nouvelle est d'une grande tristesse. Une incroyable tristesse...
Des soirées entières à attendre que les températures veuillent bien descendre sous la barre des 30°C, des réveils en sueurs alors que le jour se lève à peine et que le thermomètre affiche encore 25°C au compteur : le quotidien lyonnais n'est pas des plus agréables. Cette canicule et sa chaleur étouffante et harassante qui essore les corps et embrouille les esprits annihile toute volonté de faire quoi que ce soit.
Mais tout de même, il fallait parler d'une des chansons qui accompagnent mes soirées de sudation depuis bientôt quinze jours : Start With The Sound. C'est elle qui ouvre le nouvel album de Tim Arnold, artiste anglais que je découvre et qui vient de publier 'Super Connected', à propos duquel la critique anglo-saxonne est plus qu'élogieuse. Un disque qui a du Bowie (beaucoup), du Muse (un peu moins mais tout de même), pas mal d'emphase, une fausse pub dite par Stephen Fry et une pochette où l'on croirait reconnaître au premier regard Brian Molko avec des cheveux bleus.
Mais revenons à notre chanson, Start With The Sound. De toutes, c'est la plus marquante de l'album. Un rythme lascif et répétitif (ce «Don’t let it follow. Let it lead. Start With The Sound» répété comme un robot jusqu'à plus soif), une rythmique métronomique, le chant de Tim Arnold si prégnant. Et surtout cette avalanche de cordes qui ne s'annonce pas et déboule sans crier gare au milieu du morceau. Une arrivée majestueuse, tendue, mélancolique et mélodieuse où notre homme cajole ses cordes, les fait vibrer, et en exploite la beauté au maximum. Un petit déluge délicieux. Et en désespérant de voir arriver celui qui doit venir nous sauver de notre torpeur actuelle, on prendra celui-ci comme substitut.
Il y a trois chansons marquantes sur le nouvel album de Benny Sings, artiste néerlandais de son état dont j'avais évoqué l'anecdotique 'City Pop'
en 2019 (avec quelques jolis moments néanmoins, soyons honnêtes) : The Only One, petit tube sautillant d'électro-pop, la courte et sublime balade Love Will Find a Way qu'on jurerait avoir été composée par Daniel Johnston, et Pyjamas, chanson solaire et légère que Benny Sings chante avec l'américaine Remi Wolf.
Difficile de trancher tant ces trois chansons ont toutes un charme différent. Mais à l'orée d'une semaine écrasante de chaleur entre Rhône et Saône et qui promet d'être encore plus insupportable que les cinq derniers jours, partons donc sur Pyjamas pour rafraîchir nos oreilles. Quand bien même on dort à poil depuis un bail.
Album : Young Hearts Année : 2023 Label : Stones Throw Records
Décidément, Róisín Murphy est partout cet été. Et elle a décidé de mettre du hit un peu de partout. Non contente d'appâter le chaland avec quelques extraits de son nouvel album à venir le 8 septembre prochain (on y reviendra), voilà que l'incroyable chanteuse de feu Moloko vient d'être invitée par Jessie Ware à reprendre Freak Me Out, un des tubes de son 'That! Feels Good!' sorti au printemps dernier (et plus que recommandable par ailleurs).
Si la chanson originale, extrêmement bien produite et aux multiples couches
réjouissantes, était déjà un tube, cette version monte encore le niveau d'un cran. Le mariage des deux voix est impeccable, celle de Róisín Murphy apportant ce je ne sais quoi en plus qui rend
l'ensemble encore plus dansant et immédiat. Un titre à l'efficacité peu commune cette année et incontestablement un des sommets de cet été 2023.
Je ne sais pas si c'est la même chose pour vous, mais le 15 août marque chez moi la fin officielle de l'été. Peut-être à cause d'une rentrée qui s'approche à grands pas, ramenant avec elle tous les aoutiens dans les bureaux et sur les routes désertées depuis près de trois semaines. Ou parce que le grand raout familial annuel passé à discuter et festoyer avec des cousines, des cousins et autres oncles et tantes a tiré sa révérence après sa 72è édition.
Pour autant, nous sommes toujours (et encore pour plus d'un mois) en été. Et au niveau musical, il reste encore quelques chansons estivales à dégotter. J'avais évoqué mi juin le Bang des Melenas, qui s'est imposé comme le morceau de mon été 2023 - avec quelques autres. Rajoutons à cette courte liste le nouveau single des anglais d'Hot Chip, Fire of Mercy. Enregistré avec l'aide prépondérante de Yunè Pinku, jeune artiste irlando-malaisienne, ce titre (qui semble être un one-shot) a une vibe très The Postal Service sur tous les couplets. Un morceau dansant autant que lascif, avec une mélodie entêtante au possible. Comme Hot Chip le chantait en 2005, « Hot chip will break your legs, snap off your head. Hot Chip will put you down, under the ground ».
En 2008, Thee Silver Mt. Zion Memorial Orchestra & Tra-La-La Band (c'était leur nom d'alors) avait publié en ouverture de '13 Blues for Thirteen Moons' un de leurs plus grands morceaux, 1000000 Died to Make This Sound. Quinze ans plus tard, leurs confrères Explosions in the Sky font mieux en publiant Ten Billion People. Dix mille fois plus, rien que ça.
Ce morceau sera le titre d'ouverture de leur prochain album à paraitre le 15 septembre prochain, au nom énigmatique de 'End' mais qui ne signifierait pour autant pas la fin des aventures du quatuor d'Austin si l'on en croit les protagonistes. Toujours est-il que 25 ans après leurs débuts, les Explosions in the Sky semblent encore avoir envie d'en découdre. Puissant, avec notamment une rythmique très présente, leur post-rock n'en reste pas moins toujours mélodieux et mélancolique, agencé pour mieux faire chavirer les choeurs, les faire exploser avant de les cajoler sur la fin.
Album : End Année : 2023 Label : Temporary Residence / Bella Union
Après une vie incroyable faite d'insuccès incompréhensible aux États-Unis et en Europe (pourtant souvent terre d'accueil d'artistes ignorés outre-atlantique), de grosse popularité en Australie et surtout dans une Afrique du Sud encore sous le régime de l'apartheid et d'une vie de labeur ingrat longtemps loin des spotlights, Sixto Rodriguez vient donc de tirer le rideau et remiser définitivement sa guitare au placard à 81 ans, après quinze dernières années folles qui l'auront vu lui (et son entourage) essayer de rattraper le temps perdu.
« But thanks for your time, then you can thank me for mine » chante Rodriguez en ouverture de Forget It, chanson d'amour aussi courte que superbe. Au lendemain de sa disparition, il ne reste plus que cela à faire, oui : dire merci.
A mille lieues de la production erratique du dernier Sweeping Promises, les belges d'It It Anita font sonner leur nouveau single Don't Bend (My Friend) comme personne : un son massif et une production puissante pour marquer les esprits et les oreilles.
Premier extrait d'un nouvel album à venir, ce morceau est une charge non voilée contre la nouvelle mode de pré-commande qui a contaminé toute l'industrie musicale (et notamment indépendante). Sur fond de rythmique martiale, de guitares lourdes et de chant puissant, les It It Anita déclament : « The only thing that matters is pre-sales. It's not about music, it's about pre-sales. Tutorials to increase your pre-sales. Don't bend ! my friend ».
Pour autant, dans un monde où la moindre nouveauté est effacée dans l'heure par la suivante, difficile de ne pas comprendre cette obligation pour nombre d'artistes de se transformer en community managers et en commerciaux pour faire en sorte que que leurs œuvres existent et sortent, ne fut-ce qu'un temps, de l'indifférence dans laquelle elles sont vouées à rester.
Difficile donc d'avoir un avis tranché. Sauf pour les It It Anita, qui avec Don't Bend (My Friend) donne un avant-goût remarquable à leur prochain album. Un disque dont, vous imaginez bien, l'on ne sait pas grand chose à part qu'il sortira à l'automne prochain, qu'il sera publié par Vicious Circle et les belges de Luik Music. Et qu'il n'est, évidemment, pas possible de pré-commander. Don't Bend (My Friend).
On aurait pu croire qu'en signant chez Sub Pop, Sweeping Promises rentrerait dans le rang et mettrait un peu de souplesse dans sa production. Que nenni. Ces gens là ont une idée bien précise de comment doivent sonner leurs mélodies et leurs chansons. Et ils n'ont pas envie de changer.
Révélation de mon année 2021 avec'Hunger for a Way Out', succès inattendu et incroyable (8000 vinyles pressés à ce jour, chiffre proprement exceptionnel pour un groupe indé) et qui explique leur signature sur le label de Seattle, le duo formé de Lira Mondal (basse, chant) et Caufield Schnug (guitare, synthé et tout le reste) continue donc son petit bonhomme de chemin aux virages faits de post-punk, d'art-rock, et de production lo-fi. Ils continuent d'utiliser leur "single mic technique" pour enregistrer leurs chansons (soit un seul micro), ce qui est devenu leur marque de fabrique, et le résultat est peut-être encore plus radical que sur leur disque précédent.
Mais qu'on ne se méprenne pas : les Sweeping Promises ne se cachent pas derrière de la reverb et une production brute. Car les dix chansons de 'Good Living Is Coming For You' prouvent qu'on a affaire à des sacrés compositeurs (on se prend à imaginer le succès que connaitraient ces chansons cabossées avec une production plus traditionnelle). Mais les Sweeping Promises sont intransigeants et s'en foutent de sonner comme il faut. Tant mieux. Qu'ils en soient remerciés.
Album : Good Living Is Coming For You Année : 2023 Label : Feel It Records / Sub Pop
Commençons donc la semaine avec tristesse. Enfin avec Sadness plutôt, le premier extrait de 'Lines', le quatrième album de Soft Science, sextet inconnu à mes oreilles et venu de Sacramento en Californie, bien charpenté autour de deux guitares et de la voix de Katie Haley. Un titre noisy-pop à souhait, à l'ambiance shoegazienne, rêveuse et très mélodique. Des guitares qui glissent et n'hésitent pas à riffer, une batterie métronome et une voix comme venue et produite d'une autre époque. Séduisant, mélancolique et sacrément aguicheur.
Aujourd'hui nous sommes le 4 août. Et ce 4 août est un vendredi. Mais
pas n’importe lequel : le premier vendredi du mois. Et vous savez ce
qu'il se passe le premier vendredi de chaque mois ? Non, pas la
diffusion d'un film porno sur une chaine cryptée à l'esprit depuis
longtemps disparue (rendez-vous incontournable pour tout adolescent des
années 90 qui se respectait et qui aimait vivre dangereusement, tant la
programmation discrète d'un enregistrement sur le magnétoscope familial
relevait d’une mission d'infiltration). Mais quelque-chose de bien moins
obscène : le Bandcamp Friday. Ou cette formidable idée de Bandcamp,
lancée durant le premier confinement en 2020, qui laisse aux artistes
l'intégralité des revenus réalisés sur la plateforme le premier vendredi
de chaque mois (donc). Une manne non négligeable à l'époque et sans
doute encore plus aujourd'hui où l'industrie se casse la gueule et où
les premiers à tomber sont les groupes à quelques
milliers d’écoutes (au mieux) sur les plateformes de streaming et les labels indépendants aux reins peu solides.
Nous
sommes donc le 4 août et il y a un peu plus d’un mois, Special Friend a
sorti son deuxième album, 'Wait Until the Flames Come Rushing in'. Un
disque qui fait bien plus que confirmer les promesses entendues sur 'Ennemi Commun' en 2021 tant il voit le duo franco-américain Guillaume
Siracusa/Erica Ashleson (lui à la guitare, elle à la batterie, eux au chant) si ce n'est se défaire du cadre dans lequel ils avaient décidé d'évoluer, au moins se l'approprier pleinement.
Pourtant, 'Wait Until the Flames
Come Rushing in', certes peut-être moins bruitiste, se situe dans la
droite lignée de son prédécesseur. Mais il est plus affirmé, plus
ambitieux. Minimal sans l’être, à la production plus marquée (et qui
sied particulièrement bien aux compositions),
ce deuxième album de Special Friend est un disque plein de certitudes,
où les mélodies rock langoureuses et mélancoliques, le noise-pop et ce parfum de
slowcore qui flotte un peu partout se tiennent dans un équilibre tout
sauf instable tant on sent une vraie certitude émaner des
chansons du duo.
J’ai lu quelque part qu’il se dégageait une sorte de « cool
» de cet album. Et c’est vrai, il y a de cela dans 'Wait Until the
Flames Come Rushing in'. Un disque qui ne se presse pas, qui prend son temps autant dans ses chansons que pour marquer l'auditeur : de prime abord très anodin, il se révèle très vite plein de charmes, singulier autant qu'épatant.
Alors en ce premier vendredi du mois, que vous soyez les doigts de pieds
en éventails sur une plage au sud de l’Europe ou bien au chaud dans
votre pull et votre ciré en Bretagne, prenez cinq minutes de votre temps pour vous
offrir un des tous meilleurs albums (et pas qu'à guitares) publiés en 2023. Vos oreilles vous remercieront, Special Friend, Hidden Bay Records et Howlin Banana Records aussi. (Sortie : 30 juin 2023)
Trois chansons de 'Wait Until the Flames Come Rushing in' de Special Friend en écoute aujourd'hui. Selkie, la chanson d'ouverture et son pont avec quelques cordes belles comme tout (en écoute également dans les playlists Spotify, Deezer, YouTube et dans la colonne de gauche du blog). Puis le nerveux Fault Lines. Et enfin la chanson titre Wait Until The Flames Come Rushing In qui résume assez bien l'album :
Les clip de Selkie et de Bête, les deux premières chansons de 'Wait Until the Flames Come Rushing in' de Special Friend :
En 2021, 'Fantasy Country' avait été une belle porte d'entrée dans l'univers des Flyying Colours, ce groupe aux deux « y » venu de Melbourne. Mais malgré sa qualité, rien ici, même pas ce Big Mess pétaradant et plutôt jouissif ne laissait présager une suite de cette qualité là.
Après avoir réédité ses deux premiers Ep en un seul et même disque l'an passé (le simplement nommé 'Flyying Colours'), le quatuor a publié en mars dernier 'You Never Know'. Un troisième album dont le seul défaut serait peut-être sa pochette qui ne rend pas hommage au reste tant elle semble banale et clichée « dream pop » au possible dans ces couleurs Instagram qui ont envahies notre quotidien depuis une bonne décennie. Mais pour le reste, difficile de faire la fine bouche devant ces dix chansons.
Que les fans de la première heure se rassurent, le groupe n'a pas
délaissé les guitares bruyantes et qui distordent : elles sont là, bien
présentes et notre quatre compères les manient avec un savoir-faire
désormais sûr. Mais sans doute pour la première fois, les Flyying Colours trouvent l'équilibre parfait entre leurs amours shoegaze qui imprègnent leurs chansons depuis leurs débuts et une pop engageante et mélodique.
Et c'est là la force de 'You Never Know' : cette capacité à relever chacune des compositions de petits gimmicks pop anodins, souvent mélancoliques, voire de cordes (qu'on imagine synthétiques) mais qui ont le bonheur d'être là (superbe Modern Dreams) et qui font toute la différence. Mieux, les Flyying Colours se révèlent même fameux lorsqu'ils s'échappent totalement de leur canevas shoegaze pour composer un titre 100% pop (Goodbye to Music, où le chanteur Brodie Brümmer exprime sa
crainte de perdre ses capacités auditives après tant d'années à avoir
maltraité ses oreilles) et donnent envie de les voir continuer d'explorer cette voie.
Extrêmement bien construit (le tracklisting, très intelligent, est d'une fluidité parfaite), produit avec soin, mené par des motifs de guitares répétitifs et métronomes qui tiennent la barre de chaque chanson, avec ces voix souvent cachées derrière un voile sans pour autant être trop en retrait, 'You Never Know' est presque une surprise tant, si l’on connaissait le talent des Flyying Colours, on n’imaginait pas les voir composer un album aussi solide. Décidément, l'Australie... (Sortie : 17 mars 2023)
Trois chansons de 'You Never Know' de Flyying Colours en écoute aujourd'hui. I Live In A Small Town et son énergie implacable pour ouvrir le bal (en écoute également dans les playlists Spotify, Deezer, YouTube et dans la colonne de gauche du blog). Puis le mélancolique Modern Dreams. Et enfin, Goodbye to Music, peut-être la chanson la plus pop à ce jour des Flyying Colours :
Le clip du seul single, à ce jour, tiré de 'You Never Know' de Flyying Colours, le très pop Goodbye to Music :